Le nom du martyr Ahmed Zabana restera attaché pour l'éternité à l'usage de la guillotine en Algérie. La guillotine, cette atroce machine de guerre utilisée par la France coloniale en couronnement de tant de moyens de répression, de damnation et d'injustice mis en branle contre le peuple algérien qui luttait pour le recouvrement de sa liberté, restera un témoin irremplaçable des crimes commis par le colonialisme pendant la Révolution algérienne. Près de 200 militants de la cause nationale sur les 1500 condamnés à mort, ont été exécutés entre 1956 et 1962 car les autorités judiciaires coloniales avaient jugé «juste» de leur couper la tête avec une lame de plus de 70 kg lancée d'une hauteur de 3,5 mètres. L'histoire retiendra que la guillotine a été utilisée pour la première fois en Algérie en 1843, treize ans après le début de l'invasion du pays par les troupes coloniales françaises. Cet abominable châtiment a aussi servi de moyen de dissuasion pour «terroriser» les Algériens déterminés alors comme jamais, à se libérer du joug colonial, relèvent les historiens. Le nom du martyr Ahmed Zabana restera attaché pour l'éternité à l'usage de la guillotine en Algérie. Il fut le premier militant à être guillotiné un 19 juin de l'année 1956 dans la prison de Barberousse (Serkadji), suivi le même jour par Abdelkader Ferradj. D'autres Algériens comme des Français solidaires de la cause nationale furent aussi impitoyablement étêtés. Selon des chiffres fournis par d'anciens condamnés à mort, il y eut en tout 69 exécutions de cette façon à Alger, 56 à Constantine, 51 à Oran et 22 en France même. Les personnes condamnées à mort puis graciées gardent encore l'amer souvenir des moments passés à la prison de Barberousse, des moments chargés de souffrances, d'humiliations, de terreur et...de l'infernale attente de l'exécution à la guillotine. Aucun d'entre eux ne connaissait le jour exact où il doit passer sous la lame tranchante. Seule l'heure fatidique était connue de tous: 4 heures du matin. L'ancien moudjahid Ali Drafli, condamné à mort en 1957 alors qu'il n'avait que 21 ans, admet avoir été «terrifié» à l'idée de mourir la tête coupée, mais le fait que le sacrifice en valait la peine a «beaucoup atténué» sa peur, dit-il. «L'attente de la mort était insupportable. Nous vivions chaque minute qui passait en attendant l'aube comme une éternité, car nous ne savions pas, de surcroît, qui d'entre nous allait être exécuté», se rappelle M.Drafli, actuellement vice-président de l'Association nationale des anciens condamnés à mort. «Ceux qui restaient dans la cellule au moment de l'exécution de l'un des compagnons vivaient cet instant tiraillés entre la peur, la terreur, l'angoisse et même la déprime pour certains, mais c'est le sentiment de révolte contre l'injustice et la répression françaises qui prenait à chaque fois le dessus», ajoute-t-il avec la fierté de celui que les épreuves ont endurci. «Il est vrai que la France nous a fait vivre l'enfer, mais cet enfer a eu un effet boomerang, n'ayant fait que renforcer notre foi en Dieu et notre amour du pays, deux choses qui nous ont motivés en permanence pour poursuivre le combat jusqu'au dernier souffle», indique M.Drafli. La guillotine, qui ne l'impressionnait pas pendant la Révolution, selon ses dires, lui donne actuellement «la chair de poule». Cette réaction émotionnelle apparaît au grand jour lorsqu'il se met face à cette machine à couper les têtes, lors de ses multiples visites au Musée central de l'armée où elle est exposée à l'attention du public.