Régionalisation, décentralisation, fiscalité, loi électorale, c'est Zerhouni à coeur ouvert. «Le rapport de la commission de réforme de l'Etat permettra une plus grande transparence dans l'action de l'administration publique et des collectivités locales, tout comme il propose des dispositifs garantissant une meilleure participation du citoyen dans la gestion», a déclaré en substance M.Zerhouni, ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, au cours de sa rencontre avec la presse au siège de la wilaya d'Oran, au lendemain du massacre d'Arzew. M. Zerhouni reconnaîtra que le document propose des mécanismes permettant une action plus efficace et plus transparente de l'administration publique. S'articulant autour de trois axes, le document de la commission Sbih insiste sur l'urgence de la refonte de l'Etat et de ses institutions. Outre la transparence dans la gestion des affaires de l'Etat, le rapport propose des structures et des actions pour la modernisation de l'administration publique par une meilleure gestion des ressources humaines, une étape entamée depuis le début de l'année sous forme de stages de recyclage ouverts aux cadres des collectivités locales. Concernant le volet structures du budget des collectivités locales, le document, prenant en compte les déficits enregistrés par les communes et les dettes qui entravent leur mission, le document prévoirait deux solutions : une restructuration de la fiscalité locale et une amélioration des voies et moyens de recouvrement de la fiscalité pour «doper» les rentrées des collectivités locales, surtout celles des APC. Le ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur avait souligné que la fraude fiscale a entravé les efforts des APC qui se sont retrouvées bloquées dans leur volonté d'une meilleure gestion du quotidien du contribuable. La réforme de l'Etat pourrait se traduire par une réadaptation des lois actuellement en vigueur. Ainsi, le code communal, le découpage administratif et la loi électorale pourraient subir des modifications en vue d'une gestion plus souple des affaires du citoyen, des collectivités locales et de l'Etat. En évoquant la possibilité de création de structures de coordination interwilayas, le, ministre de l'Intérieur a laissé entendre que ces dernières pourraient voir le jour à l'occasion des projets intéressant plusieurs wilayas. Ces structures ne pourraient être assimilées à des regroupements régionaux pouvant être une porte ouverte vers une «fédéralisation» du pays qui reste une donnée anticonstitutionnelle à l'heure actuelle. M.Zerhouni, répondant à la question d'un confrère sur le Mouvement pour l'autonomie de la Kabylie, présidé par le chanteur Ferhat Mehenni, a été explicite à plus d'un titre en affirmant qu'il ne pourrait être agréé car étant d'essence anticonstitutionnelle. Ces propos ferment la porte devant ceux qui militaient pour un Etat fédéral basé sur une régionalisation ou une «cantonnalisation» de l'Algérie. Même si l'idée n'est pas nouvelle, il semblerait que du côté des cercles de décision on soit encore hermétique à tout débat sur le sujet. L'idée, qui ne date pas d'hier, a été prônée par plusieurs parties après l'indépendance avant d'être le cheval de bataille du Fajr (Force algérienne pour la justice et le renouveau) créé en 1996 à Oran et qui militait ouvertement pour une régionalisation de l'Etat calquée sur le modèle espagnol. L'idée avait disparu avec la dissolution de ce parti miné par des luttes claniques et tribales qui avaient fini par le faire imploser quelques mois avant la création du RND. M.Zerhouni a laissé entendre que toute idée de fractionnement du pays, même administrative, au-delà des limites définies par la Constitution ne saurait être tolérée, ce qui nous pousse à dire que la commission Sbih a pris comme socle, pour entamer sa réflexion, l'état actuel des choses tant sur le plan des structures que sur le plan des dispositions légales. Une telle décision - l'autonomie de certaines régions - ne pourrait relever du pouvoir exécutif tant elle est sous-tendue par des considérations constitutionnelles assujetties à la volonté du citoyen. Les Assemblées populaires - légalement élues - pourraient «plancher» sur le sujet, un sujet que nulle commission de réflexion ne pourrait aborder par crainte de se mettre en porte-à-faux par rapport à la Constitution et aux lois du pays. Il paraît évident, en l'état actuel des choses, que le rapport de la commission Sbih aborder, des préoccupations plus techniques que légales, c'est ce qui expliquerait le black-out qui l'entoure, même si dans certains cercles on soutient qu'il constitue la botte secrète avec laquelle le Président de la République bloquera ses adversaires pour se lancer résolument dans la concrétisation des grands chantiers de réforme de l'Etat algérien.