La légalité de la déclaration unilatérale d'indépendance du Kosovo vis-à-vis de la Serbie va être débattue à partir de demain à La Haye devant la Cour internationale de justice (CIJ), chargée de rendre un avis consultatif. La Serbie, le Kosovo et 29 Etats, dont la Russie, les Etats-Unis, la France et l'Espagne, vont présenter jusqu'au 11 décembre leurs arguments, pour le moment confidentiels, aux juges du principal organe judiciaire des Nations unies. La Cour doit répondre à la question suivante: «La déclaration unilatérale d'indépendance des institutions provisoires d'administration autonome du Kosovo est-elle conforme au droit international?». Le Kosovo, qui compte 2 millions d'habitants, dont 90% sont Albanais,avait, le 17 février 2008, proclamé son indépendance, à laquelle Belgrade est farouchement opposée. Soixante-trois pays, dont 22 des 27 pays de l'Union européenne, l'ont reconnue. La Serbie avait obtenu le 8 octobre 2008 de l'Assemblée générale des Nations unies qu'elle saisisse la Cour sur la légalité de cette proclamation par le Kosovo, que Belgrade continue de considérer comme sa province méridionale. La question de la proclamation d'indépendance du Kosovo n'est «pas politique mais juridique», a estimé récemment Sasa Obradovic, le conseiller juridique de la Serbie devant la Cour, selon lequel elle viole le droit international. Belgrade et Pristina n'ont pas développé publiquement les arguments qu'ils vont exposer devant les juges. Même si l'avis de la Cour n'est pas contraignant, la Serbie espère qu'il lui permettra de reprendre des négociations avec le Kosovo sur son statut. Quinze des 29 Etats qui participeront aux audiences ont reconnu l'indépendance du Kosovo, comme les Etats-Unis ou la France. Parmi les quatorze autres se trouvent des pays comme l'Espagne, la Chine ou la Russie, qui craignent que ce précédent n'encourage les séparatismes sur leur territoire. «Si la Cour reconnaît la légalité de la sécession du Kosovo, cela aura des conséquences pour la région et créera un précédent de portée internationale», explique Steven Blockmans, juriste de l'Institut Asser, spécialisé dans le droit international. La Serbie et les Etats qui ne reconnaissent pas l'indépendance du Kosovo devraient insister devant les juges sur le fait que le droit international «interdit de modifier les frontières d'un pays» comme l'a fait le Kosovo envers la Serbie, souligne-t-il. «Les pays qui vont intervenir en faveur du Kosovo souhaitent une interprétation plus progressiste du droit public international, avançant des circonstances exceptionnelles», continue Steven Blockmans. «Ils diront que les Kosovars ont été tellement opprimés par les Serbes qui n'ont pas respecté leur droit à l'autodétermination et leurs droits de l'Homme, que cette situation de colonisation intérieure ne peut perdurer», ajoute le juriste. Depuis sa création en 1946, la CIJ, chargée de régler les différends entre Etats, a rendu 25 avis consultatifs. Dans l'un d'eux, rendu le 9 juillet 2004, la Cour avait jugé «contraire au droit international» la barrière de séparation qu'Israël a construite en Cisjordanie.