Il s'agissait de la décision la plus attendue et peut-être la plus lourde de conséquences de sa présidence, alors que la guerre est de plus en plus impopulaire aux Etats-Unis, huit ans après l'invasion. Barack Obama a annoncé mardi soir le déploiement accéléré de 30.000 soldats supplémentaires en Afghanistan, assurant à des Américains sceptiques que cette escalade, justifiée par la sécurité nationale, serait limitée dans le temps. Soulignant que «l'Afghanistan n'est pas perdu», mais que la menace d'Al Qaîda persiste, le président des Etats-Unis a qualifié l'envoi de ces renforts d'«intérêt national vital», dans un discours devant les élèves de la prestigieuse école militaire de West Point dont certains vont aller au front. «Je ne prends pas cette décision à la légère», a martelé M.Obama dans un discours de plus de 30 minutes, parfois professoral, souvent grave, en rendant hommage au sacrifice des militaires et de leurs familles. Il a aussi concédé que cet envoi allait alourdir de 30 milliards de dollars la facture de la guerre pour les contribuables. «Les 30.000 soldats supplémentaires dont j'annonce l'envoi ce soir se déploieront dans la première partie de 2010 -au rythme le plus rapide possible- afin de s'en prendre à la rébellion et de sécuriser les grands centres de population», a souligné M.Obama. Mais soucieux de ne pas prêter le flanc aux craintes d'enlisement et rejetant avec force toute analogie entre cette guerre et le désastre du Vietnam, il a assuré qu'«après 18 mois, les troupes commenceront rentrer à la maison», soit à partir de juillet 2011. «Si je ne pensais pas que la sécurité des Etats-Unis et de celle des Américains était en jeu en Afghanistan, demain je donnerais avec joie l'ordre à tous les soldats jusqu'au dernier de rentrer», a énoncé le président. Il s'agissait de la décision la plus attendue et peut-être la plus lourde de conséquences de sa présidence, alors que la guerre est de plus en plus impopulaire aux Etats-Unis, huit ans après l'invasion. Le contingent américain en Afghanistan va donc atteindre environ 100.000 hommes et femmes, soit quasiment trois fois plus que lorsque M.Obama a pris ses fonctions en janvier, une concrétisation de sa promesse de recentrer sur ce pays l'effort détourné à ses yeux par la guerre en Irak. Le général Stanley McChrystal, commandant des forces américaines et de l'Otan en Afghanistan qui avait ouvertement réclamé 40.000 soldats supplémentaires, a salué cette annonce, estimant qu'elle lui fournissait les «ressources» nécessaires pour mener à bien sa mission. M.Obama a aussi lancé un avertissement particulièrement musclé au président afghan Hamid Karzaï, dont la réélection a été entachée de fraudes et dont le gouvernement est accusé de corruption: «l'époque du chèque en blanc est révolue», a-t-il asséné, ajoutant que «nous allons clairement expliquer ce que nous attendons de la part de ceux que nous aidons». M.Obama, qui menait depuis trois mois des consultations serrées avec son état-major et les hauts responsables de son administration, a mentionné l'importance d'un «partenariat efficace» avec le Pakistan, l'un des trois «éléments-clés» de sa stratégie militaire, au côté des efforts pour confier les rênes de la guerre aux Afghans eux-mêmes et de l'envoi de coopérants civils. «Nous allons agir en étant parfaitement conscients que notre succès en Afghanistan est lié inextricablement à notre partenariat avec le Pakistan», en butte aux extrémistes et où la hiérarchie d'Al Qaîda se cache selon toute vraisemblance, a-t-il scandé. Il a aussi prévenu qu'Al Qaîda prépare «de nouveaux attentats à l'heure où je vous parle» contre les Etats-Unis, et appelé à «faire face» aux terroristes partout, en mentionnant en particulier la Somalie et le Yémen. Après avoir multiplié les contacts ces deux derniers jours avec ses partenaires au sein de la coalition en Afghanistan, M.Obama les a appelés à renforcer eux aussi leur présence: «Parce qu'il s'agit d'un effort international, j'ai demandé à ce que les alliés s'associent par des contributions à notre engagement», a-t-il déclaré.