La présidence de l'UE a appelé le Maroc au respect de ses obligations internationales relatives aux droits de l'homme. L'état de santé d'Aminatou Haïdar qui se dégrade d'heure en heure, suite à une grève de la faim qu'elle a entamée depuis 26 jours, a mis en émoi la communauté internationale. La présidence suédoise de l'Union européenne y a joint sa voix. Elle exprime «son inquiétude quant à la santé de Mme Haïdar, et appelle les autorités marocaines à respecter ses obligations internationales relatives aux droits de l'homme et à coopérer avec les autorités espagnoles afin qu'une solution positive puisse être trouvée concernant sa situation», indique le texte publié il y a quarante-huit heures. La militante sahraouie des droits de l'homme réclame son retour parmi les siens après avoir été expulsée le 13 novembre dernier de l'aéroport d'El Aâyoune vers l'île de Lanzarote (archipel des Canaries), par les forces marocaines. Les autorités du Makhzen font pour le moment la sourde oreille et optent pour la diversion. La dénommée Aminatou Haïdar «connaît le chemin qui mène au Maroc: elle doit admettre son erreur et présenter des excuses pour offense aux symboles de la nation», a déclaré jeudi à la presse, à l'issue d'un Conseil de gouvernement, le ministre marocain de la Communication et porte-parole du gouvernement, Khalid Naciri. Les réactions d'indignation de la communauté internationale, suscitées par la situation dramatique de la militante sahraouie prise en «tenailles» entre les administrations marocaine et espagnole, n'ont pas, en apparence, altéré la position des hauts responsables du Royaume, encore moins provoqué d'émotion chez eux. Et comme pour se perdre un peu plus en conjectures, le ministre de la Communication, Khalid Naciri, divague. La communauté internationale, selon ce dernier, doit se rappeler que «l'Algérie interdit à des dizaines de milliers de Marocains séquestrés dans les camps de Tindouf de rejoindre leur pays». Il faut peut-être lui rappeler, encore une fois, que les réfugiés de Tindouf, qui sont des Sahraouis privés de leur patrie du fait de la colonisation du Sahara occidental par le Maroc, attendent au même titre qu'Aminatou Haïdar l'application pure et simple des résolutions votées et adoptées par le Conseil de sécurité. Ce qui leur garantirait la tenue d'un référendum qui puisse leur permettre de s'exprimer librement quant à leur destin. Il faut signaler que les réactions se sont bousculées en cette veille de week-end pour ce qui concerne l'affaire de la pasionaria sahraouie. En ce sens, ce sont les élus du Parlement européen qui font feu de tout bois et mettent le plus la pression sur le gouvernement marocain. Jeudi, des eurodéputés en visite à Lanzarote pour apporter leur soutien à Aminatou Haïdar, ont appelé au gel du statut avancé qui doit lier le Maroc à l'Union européenne. La mise au ban du concert des nations du Royaume, est sans appel. «Le Maroc viole les droits de l'homme et nous demandons le gel d'une initiative (statut avancé) qui ferait pratiquement du Maroc un Etat membre sans l'être. Ce serait, sans doute, le pire geste de l'histoire de l'UE en matière de décolonisation», a déclaré Willy Meyer, parlementaire européen, espagnol, de la Gauche unie. Une déclaration qui prend toute sa force en cette journée du 10 décembre, jour de la célébration du 61e anniversaire de l'adoption de la Déclaration universelle des droits humains par l'assemblée générale des Nations unies. A cette occasion, les associations marocaines n'ont pas hésité à manifester leurs inquiétudes. «La situation actuelle du Maroc en matière des droits humains est inquiétante. Après les nombreux acquis et réalisations dans les années 90, le Maroc est dans une tendance de recul préoccupante. Les violations graves de droits humains sont de plus en plus nombreuses: tortures, enlèvements, procès inéquitables, conditions carcérales catastrophiques, violences à l'égard des femmes et des enfants, harcèlement et menaces à l'encontre de défenseurs des droits humains et j'en passe», a déclaré la présidente de l'Amdh, l'Association marocaine des droits humains. Le directeur d'Amnesty International pour l'Espagne a, pour sa part, appelé les autorités marocaines à avoir une vision moins étriquée de l'option en faveur de l'autodétermination du peuple sahraoui. «Le Maroc ne doit pas considérer l'appui pacifique à l'autodétermination du Sahara occidental comme un crime ou une menace pour sa sécurité nationale. Bien au contraire, il doit garantir le droit à la liberté d'expression de ces personnes», a tenté de convaincre Esteban Beltran. Il faut oser espérer qu'un jour, à Rabat, on osera franchir ce pas.