Le litige pourrait trouver son épilogue demain lors de la réunion extraordinaire que tiendra l'Organisation des pays exportateurs de pétrole, l'Opep, dont sont membres les deux Etats. L'affaire est à prendre très au sérieux. Téhéran qui n'avait pas encore répondu, vendredi, aux sollicitations des responsables irakiens qui lui demandaient de retirer ses soldats qui ont pris le contrôle du puits n°4 situé sur le champ pétrolifère de Fauqa dans le sud-est de l'Irak et dont les réserves sont estimées à 1,55 million de barils, a fini par reconnaître que ses militaires étaient bel et bien présents sur le site. L'occupation du puits n°4 par une dizaine de militaires et de techniciens iraniens s'est poursuivie, samedi, en dépit des protestations de la diplomatie irakienne. Toutefois, les troupes iraniennes se sont retirées hier matin avec leurs techniciens. «Nous avons convoqué, vendredi, l'ambassadeur d'Iran à Baghdad pour lui dire que cette attaque est inacceptable et notre ambassadeur à Téhéran a remis une note à leur ministère des Affaires étrangères pour leur demander de retirer leurs troupes, mais ils ne l'ont pas fait encore jusqu'à présent», a indiqué le vice-ministre irakien des Affaires étrangères. «C'est la première fois que cela se produit. Avant, les Iraniens essayaient d'empêcher nos techniciens de travailler sur ce puits foré par l'Irak, en 1974, en tirant dans leur direction mais ils ne l'avaient jamais occupé», a ajouté Mohammad al-Hajj Hamoud, conscient de la gravité de l'incident qui a pris des proportions jusque-là jamais atteintes. Et si l'on en juge par la réaction officielle des autorités militaires de la République islamique d'Iran, le différend entre les deux pays risque de s'enliser. Le bras de fer ne fait vraisemblablement que commencer. «Nos forces sont sur notre propre sol, car ce puits appartient à l'Iran selon les frontières internationales reconnues», ont répondu les forces armées iraniennes à travers un communiqué diffusé par la télévision d'Etat. La crise est sans conteste amorcée. Les différends frontaliers entre les deux Etats ne manquent pas. Ils ont déjà été, par un passé assez récent, à l'origine d'une guerre qui a duré huit longues années, entre 1980 et 1988. Le bilan officiel de ce conflit des plus meurtriers a fait état de 1,2million de morts. Des îles dans la voie fluviale du Chatt el Arab étaient revendiquées par l'Irak à l'époque. A l'heure actuelle, des informations font état de la tenue de travaux d'une commission mixte, qui doivent se tenir dans un mois en vue de procéder à la délimitation de la frontière terrestre et maritime dans cette région. A travers l'occupation de ce puits, qui symbolise l'animosité que se vouent les deux Etats, la République islamique d'Iran compte-t-elle faire pression sur son voisin? «Le ministère des Affaires étrangères avait officiellement annoncé qu'il était prêt à participer à une commission conjointe pour régler les questions frontalières et attend toujours la réponse irakienne», a fait savoir dans un communiqué Ramin Mehmanparast, porte-parole de la diplomatie de la République islamique d'Iran. Jamais depuis la chute de Saddam Hussein et l'arrivée des chiites au pouvoir en Irak, les relations entre les deux pays n'ont connu un tel degré de tension. De leur côté, les Américains ont, somme toute et en parfaite logique avec leur stratégie politique dans la région, pris position en faveur de la revendication irakienne. «Tel que je le comprends, il s'agit d'un territoire sous souveraineté irakienne et il revient aux dirigeants irakiens de résoudre le problème», a confié l'amiral Michael Mullen, chef d'état-major interarmées des Etats-Unis. Le conflit entre les deux pays sera très certainement l'invité surprise de la réunion extraordinaire de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole, l'Opep, qui se tiendra demain, à Luanda en Angola. Comment en effet, pourrait-il en être autrement au moment où les cours de l'or noir commencent à retrouver un niveau jugé acceptable (entre 75 et 80 dollars) par les pays consommateurs et les pays producteurs? Des prix, qui ne doivent pas, en principe, perturber le retour annoncé de la croissance de l'économie mondiale. Il faut signaler que cet incident frontalier entre l'Irak et l'Iran a provoqué, en fin de semaine, vendredi, un très fort raffermissement du billet vert par rapport à la monnaie unique européenne. 1,427 dollar pour un euro. Un niveau qu'il n'a pas connu depuis le début du mois de septembre. Les principaux indices boursiers avaient clôturé en légère baisse. Le CAC40 à -0,95%, le Dow Jones -0,1%...Comment va réagir le baril de pétrole? La journée d'aujourd'hui sera un véritable test pour lui.