Sanaa est engagée dans une campagne antiterroriste, intensifiée depuis la revendication par Al Qaïda de l'attentat manqué contre un avion de ligne US. La seule assistance militaire occidentale au Yémen, enjoint de sévir contre les cellules d'Al Qaîda qui y sont implantées, est insuffisante pour éradiquer le réseau extrémiste et des interventions américaines ponctuelles seront inévitables, estiment hier des analystes. «L'armée yéménite n'a ni les capacités, ni la formation nécessaires pour exploiter l'assistance militaire que lui apportent les pays occidentaux dans sa guerre contre Al Qaîda», a déclaré l'analyste militaire Riad Kahwaji. «Des armes intelligentes sont utilisées dans les opérations ciblées (menées par l'Occident) contre des positions d'Al Qaîda», souligne M.Kahwaji, directeur de l'Institute for Near East and Gulf Military Analysis (Inegma), basé à Dubaï. «Or les équipements de l'armée yéménite, y compris les avions de combat, souvent de fabrication soviétique, ne sont pas compatibles avec ce genre d'armes», ajoute-t-il. Les autorités yéménites sont engagées dans une campagne antiterroriste, intensifiée depuis la revendication par Al Qaîda dans la Péninsule arabique (Aqpa) de l'attentat manqué du 25 décembre contre un avion de ligne américain. Jeudi, elles ont fait part de leur réticence à une intervention militaire directe des Etats-Unis aux côtés de leurs troupes qui traquent les combattants de la branche locale du réseau d'Oussama Ben Laden. Une telle intervention «pourrait renforcer le réseau d'Al-Qaîda et non l'affaiblir», a averti le vice-Premier ministre aux Affaires de la défense et de la sécurité, Rached al-Alimi. «Nous allons combattre et traquer le réseau d'Al Qaîda par nos propres moyens», a-t-il dit, ajoutant: «Ce que nous demandons aux Etats-Unis, c'est une assistance en matière de formation et des armes pour les unités de lutte contre le terrorisme.» «Une intervention militaire étrangère directe aura un impact négatif sur l'opinion publique au Yémen, déjà méfiante à l'égard du gouvernement», empêtré dans une guerre contre la rébellion zaïdite dans le nord du pays et confronté à un courant séparatiste dans le sud, a expliqué un expert des groupes islamistes radicaux, Dhia Rachouane. Tout en reconnaissant que le «Yémen n'a pas les moyens de venir à bout d'Al Qaîda», il estime que «l'ampleur de la mobilisation internationale demandant une lutte contre Al Qaîda au Yémen est disproportionnée par rapport au danger que représente ce réseau dans ce pays». Les actions de la branche maghrébine d'Al Qaîda «sont plus dangereuses que celles du Yémen sans qu'elles aient suscité le même intérêt au plan international», a-t-il relevé ajoutant s'attendre à «ce que les forces spéciales américaines mènent des opérations ponctuelles et d'envergure» au Yémen. Le Pentagone a assuré jeudi que les Etats-Unis respectaient la souveraineté du Yémen et que leur rôle dans le pays se limitait à la formation et au renseignement. Mais son porte-parole Bryan Whitman a ajouté qu'il «ne spéculerait jamais» sur des opérations militaires à venir, soulignant que Washington continuerait «à chercher des moyens d'aider les pays qui veulent combattre les menaces terroristes dans leur pays». Samedi, la chaîne de télévision CBS avait rapporté que les attaques des 17 et 24 décembre contre les positions d'Al Qaîda au Yémen, qui ont fait plus de 60 morts, avaient été menées par les Etats-Unis, alors que les spéculations vont bon train sur le risque de l'ouverture au Yémen d'un nouveau front de la guerre contre le terrorisme. «Quiconque veut une intervention militaire américaine directe au Yémen doit faire vérifier sa santé mentale», a estimé Bruce Riedel, ancien responsable de la CIA. «Il est peu probable que les Etats-Unis envoient des soldats au Yémen, comme c'est le cas en Irak et en Afghanistan», a renchéri M.Kahwaji.