Ce qui s'est passé mardi 11 septembre 2001 aux Etats-Unis est terrible, horrible. Mais dans ces circonstances précises, les mots peuvent ne plus avoir de sens ou de signifiant tant le conscient ne réalise pas réellement ce qui est arrivé. Les Américains sont traumatisés et en état de choc ! Le monde également qui, en vérité, ne comprend ni ne réalise la portée des événements de New York et de Washington. Mais peut-on aussi comprendre les tenants et aboutissants d'opérations qui, dans le même temps, vous font hérisser d'horreur, tout en vous laissant admiratif face à la stupéfiante orchestration et coordination de ces attentats-suicide? Aussi, par quelque bout que l'on prenne les événements du jour apocalyptique américain, on en reste confondu. Confondu par la «presque facilité» avec laquelle les attentats aux avions-suicide ont été commis ; confondu par le «timing» de l'opération techniquement «parfaite», fantastique, qui en dit long sur le «professionnalisme» de ses auteurs ; confondu enfin, par la suffisance, sinon l'arrogance montrées dans sa première réaction par le chef de l'Etat américain George W.Bush, lequel crie vengeance et promet «de poursuivre et de punir» les responsables «où qu'ils se trouvent». On comprend parfaitement la douleur du peuple américain frappé en plein coeur. Mais faut-il aussi se dire que l'amalgame et la colère sont mauvais conseillers et à tout le moins ne peuvent servir d'instruments d'une politique. Car la vengeance n'a jamais résolu les problèmes politiques de notre monde. Problèmes complexes dont les tenants ne sont ni simples ni évidents. Cela d'autant plus que Washington directement, ou indirectement, assume à un niveau, ou à un autre, maintes responsabilités dans les dérives, les oukases, les passe-droits de leurs propres faits, ou de ceux qu'ils ont pris sous leurs ailes protectrices: l'Etat hébreu. La première réaction, hier, des analystes a été de lier quelque part les attentats avec la situation prévalant au Proche-Orient. Il est de fait que les Etats-Unis, et singulièrement le président Bush, n'ont pas bougé le petit doigt pour tenter de réduire la tension dans cette région et d'amener les deux parties à composer ne serait-ce qu'au titre de parrain du processus de paix. Or ils ont laissé les pleins pouvoirs à Israël qui, depuis onze mois, se livre à une véritable chasse aux Palestiniens qui semblent n'avoir qu'un choix : capituler ou mourir. Pour les Palestiniens, les Etats-Unis étaient le dernier recours, lesquels leur ont répondu par le mépris et l'indifférence. Que reste-t-il aux peuples dont on ne veut point écouter les appels au secours ; ni entendre les cris de souffrance, sinon la révolte et la désespérance? Et le désespoir peut mener loin! Mais, sérieusement, les Palestiniens ont-ils les moyens logistiques et financiers pour se payer le coup de tonnerre de New York? George W.Bush connaît-il réellement les soubassements du problème proche-oriental? A-t-il seulement fait l'effort de les connaître? Les Irakiens payent durement depuis dix ans le blocus imposé par les Etats-Unis. Les dirigeants américains de 2001 ont-il tenté non point de se mettre à la place d'un peuple dont les souffrance et les douleurs dépassent toutes mesures, mais de resituer et de réévaluer la problématique du Golfe dans le contexte qui est le nôtre aujourd'hui en ce début du troisième millénaire? La force ne résout pas tout, n'a jamais été la panacée, lorsqu'elle n'est pas accompagnée par l'intelligence et lorsqu'on n'en use pas avec mesure. Trop de peuples ont été mis en situation de désespérance par la politique unilatérale de la première puissance mondiale qui s'est servie de sa force incommensurable comme solution ultime. Mais, comme l'ont montré les attentats de New York et de Washington, cela ne peut être la solution. Même les Américains doivent bien s'astreindre au compromis, tant il est vrai que leur position dominante les oblige à le sagesse et à la justice des grands.