Son discours devant des soldats de la base de Fort Bragg, tout en laissant sceptique, a été peu réaliste. Le président américain, George W.Bush, s'est encore livré à une gymnastique peu convaincante sur l'état de la situation en Irak et fait, à peu de frais, une analyse édulcorée de la réalité sur le terrain. Certes, M.Bush a averti des difficultés qui attendent encore les Etats-Unis en Irak, déclarant devant des centaines de soldats de la base de Fort Bragg (Caroline du Nord): «Nous avons encore davantage de travail à faire et il y aura des moments difficiles qui mettront la détermination des Etats-Unis à l'épreuve». Mais cela entre dans l'ordre des choses d'une puissance qui s'est donné pour mission «la sauvegarde du monde» par l'imposition au reste de la planète la raison d'Etat (américain) notamment en excipant de la «sécurité future» des Etats-Unis. Ainsi, la «sécurité» US, préoccupation primordiale des USA, induit la mise au pas des autres nations et sous-entend, en parallèle, la réduction de leur liberté d'action, voire de leur souveraineté nationale. George W.Bush indique aussi: «Le travail en Irak est difficile et dangereux. Comme la plupart des Américains, je vois les images de violence et de sang. Chaque image est horrible et la souffrance est réelle. Devant toute cette violence, je sais que les Américains se posent la question - le sacrifice en vaut-il la peine?. Cela en vaut la peine et c'est vital pour la sécurité future de notre pays». Ainsi, le président américain reprend à son compte l'axiome impérialiste selon lequel la sécurité des USA et la paix dans le monde ne peuvent être assurées que dans la mesure où ils sont sous le contrôle d'un seul pays, les Etats-Unis en l'occurrence, conforté par des expertises drastiques de toute évolution donnant à d'autres pays les moyens susceptibles de leur assurer leur autodéfense, (cf. les cas du nucléaire iranien et nord-coréen et la guerre ouverte que leur mène Washington) quand, simultanément, les Etats-Unis renforcent leur propre arsenal militaire qui est déjà gigantesque et absorbe les 2/3 des budgets réservés à la défense dans le monde. Cette politique impériale américaine est affermie par le rapport que le président Bush fait entre les attentats de 2001, contre le World Trade Center de New York, et l'invasion de l'Irak, attentats avec lesquels ce pays, -c'est aujourd'hui une certitude- n'avait aucun lien. L'Irak, c'est aussi prouvé désormais, ne détenait aucune arme de destruction massive (ADM) comme l'en accusaient les Etats-Unis, ce qui leur a permis, en excipant de cette prétendue affaire des ADM, d'envahir ce pays le 20 mars 2003, allant à l'encontre des recommandations du Conseil de sécurité des Nations unies et de la communauté internationale. M.Bush affirme à ce propos que les «terroristes peuvent tuer des innocents mais ils ne peuvent arrêter la marche de la liberté. Nos ennemis ne gagneront que si nous oublions les leçons du 11 septembre, si nous abandonnons les Irakiens à des hommes comme Zarqaoui et si l'avenir du Moyen-Orient est laissé à des hommes comme Ben Laden» Or, Al-Zarqaoui, qui n'existait pas avant l'invasion de l'Irak, est d'abord et avant tout une création américaine et une conséquence directe de l'occupation de ce pays par l'armée américaine. Le président américain a encore affirmé que les terroristes «tentent d'ébranler notre résolution comme ils ont essayé de le faire le 11 septembre 2001. Ils échoueront. Les terroristes ne comprennent pas l'Amérique. Les Américains ne cèdent pas sous la menace et ne laisseront pas notre avenir être décidé par des auteurs d'attentats à la voiture piégée et des assassins». M.Bush qui, lui, ne semble pas comprendre le monde et le Moyen-Orient plus particulièrement, affabule et fait de l'amalgame facile d'autant plus que le «terrorisme» irakien s'est développé à l'ombre de l'occupation américaine. Aussi, ne pas tenir compte de cet aspect de l'occupation, comme le fait le président américain, -lequel, jouant à l'autruche, renvoie les torts sur le dos des autres- montre jusqu'où peut aller son aveuglement quant aux faits qui ont présidé à l'éclosion de la criminalité en Irak, niant ainsi la responsabilité de son administration dans la détérioration de la situation en Irak et dans les malheurs qui se sont abattus sur ce pays. Cette façon de faire est peu rationnelle et fait douter du fait que le président américain appréhende réellement les retombées et l'impact qu'a eu l'invasion de son armée sur l'Irak et sur le reste du monde. Mais, après le 11 septembre, il fallait faire un exemple, et l'Irak, selon les stratèges de la Maison-Blanche, en était un, car, en définitive, ce n'est pas le sort du peuple irakien ou le devenir de la démocratie qui étaient en cause, mais seulement, et uniquement, la sécurité des Etats-Unis, et leur suprématie sur le monde, c'est la seule raison pour laquelle les «boys» américains ont été aéroportés sur l'Irak, comme M.Bush ne s'est pas gêné, mardi, de le répéter devant les soldats américains de la base de Fort Bragg en indiquant que la mort, en fait sans raison, des soldats américains en Irak, «en vaut la peine et c'est vital pour la sécurité future de notre pays». Au moment où l'Irak prend peu à peu les allures d'un Vietnam, l'administration Bush -qui ne reconnaît pas les erreurs, tragiques en vérité, commises dans ce pays-, s'enfonce dans le mensonge soit par omission, soit délibérément, en celant la vérité au peuple américain, qui voit chaque jour des dizaines de ses fils et filles tomber en Irak dans une guerre inutile car entrant dans la seule option de l'hégémonie américaine sur le monde et la consécration de l'unilatéralisme américain sur la planète. Tout cela apparaît, en fait, en filigrane du discours du président Bush mardi devant les soldats américains sur la base de Fort Bragg. Ce qui indique que les Etats-Unis ne sont pas prêts à tirer toutes les leçons et conséquences qu'a induites leur invasion de l'Irak.