L'Amérique qui anticipe, qui déjoue les plans de ses ennemis avant qu'ils ne frappent, qui impose son ordre n'est plus qu'une légende. La puissante Amérique est vulnérable. Elle peut vivre l'apocalypse. Elle peut subir la guerre, elle qui la faisait subir aux autres au nom de sa sécurité ou au nom de ses intérêts économiques. Mais ce que reprochent les Américains aujourd'hui à leur administration c'est le fait de ne pas avoir anticipé les frappes. Le renseignement s'est montré défaillant. Les USA n'ont pas vu venir le coup. Le FBI, qui avait dressé des listes d'organisations terroristes susceptibles de frapper en Amérique, n'avait pas pu attirer l'attention des décideurs sur les failles du réseau de renseignement et de surveillance capable d'être utilisées par les terroristes pour des frappes. On avait braqué son regard sur Oussama Ben Laden oubliant que d'autres chefs d'organisations, de moindre envergure pouvaient frapper l'imagination en recourant à des attentats spectaculaires. Depuis la crise entre Moscou et Washington, depuis la baie des Cochons, les services de renseignements américains avaient fait, de la collecte de la moindre bribe d'information sur l'ennemi, un cheval de bataille. Pour concrétiser cet objectif, les stratèges du FBI et de la CIA recourent à une véritable campagne d'entrisme et d'infiltration. Des «taupes» sont infiltrées partout dans le monde - «A l'affût du moindre renseignement» tel était le maître mot. Des dissidents du KGB sont récupérés, des services de renseignement sont mis sous le microscope et leur fonctionnement disséqué. Dans cette lancée, les Américains se mirent alors à fomenter des conflits, des guerres au nom des intérêts des «States». Des groupes terroristes sont alors constitués pour réussir la politique de «l'endiguement» du risque communiste comme aimaient à l'appeler, à l'époque, les stratèges américains. L'Amérique s'aligne du côté des islamistes dans leur guerre contre le régime afghan de Najibullah. Les mouvements de libération (maoïste) de l'Amérique latine et centrale sont financés et entraînés par les USA qui étaient partout. La chute du mur de Berlin, l'effondrement du bloc de l'Est et la désintégration de l'adversaire URSS, placent l'Amérique dans une position de force hégémonique dans le monde. Désormais l'ordre américain régit le monde. Cette nouvelle donne entraîne des changements de rapports de Washington avec ses taupes infiltrées à travers les services secrets étrangers, ou encore avec les groupes armés qu'elle soutenait effrontément. En opérant ce recentrage de sa politique, elle s'exposait ainsi aux représailles de ceux qui étaient un jour ses pions, ses alliés. Les taupes, certains transfuges du KGB des services de renseignement des pays du bloc Est, se retrouvent lâchés dans la nature, privés de la protection que leur assurait l'Oncle Sam. Une aubaine pour Oussama Ben Laden et les chefs d'organisations terroristes. Ils tiennent là un filon capable de leur fournir des renseignements sur les points forts et les points faibles du système de surveillance du territoire américain. Déjà en 1998, quand l'ambassade américaine au Kenya fut la cible d'un attentat, des traces de transfuges ont été retrouvées dans l'organigramme de l'organisation de Ben Laden. En l'an 2000, l'attaque contre le destroyer «USS Cole» n'a été rendue possible que grâce aux renseignements d'un ancien du KGB exfiltré et enrôlé, au cours de la guerre froide par la puissante CIA. Les USA craignaient des frappes venues de l'extérieur. Elles ne pouvaient croire l'idée que le danger pouvait venir de ses aéroports. Les failles du système de surveillance de l'espace aérien américain constituaient une denrée que pouvait se payer facilement Ben Laden ou n'importe quel autre chef terroriste. L'argent sale peut corrompre le plus intègre des cadres, cela les Américains viennent de le comprendre en se réveillant sur un «day after», qu'ils n'imaginaient que dans les studios hollywoodiens.