Contrairement au scrutin de 2005, le vote de jeudi s'est déroulé dans le calme alors que les analystes s'attendent à des «jeux très serrés». Les Togolais attendaient hier de premières indications sur l'issue de l'élection présidentielle ayant opposé principalement le sortant Faure Gnassingbé, fils du défunt général Eyadema, et Jean-Pierre Fabre, présenté comme le candidat du «changement». A Lomé, le scrutin faisait l'objet de conversations enflammées et de spéculations, la Commission nationale électorale indépendante (Céni) n'ayant donné aucune date pour l'annonce des résultats, ni d'estimation sur le taux de participation. «Les jeux sont très serrés», titrait hier le quotidien privé Forum de la semaine, publiant une photo des deux principaux candidats en une. «Vote dans le calme et la sérénité», titrait pour sa part le plus grand quotidien national Togo Presse (pro-gouvernemental). «Les gens sont tendus dans l'attente des résultats parce que s'il n'y a pas le changement, il y aura encore des dégâts», a assuré hier un citoyen togolais, partisan de l'opposant Jean-Pierre Fabre. Mais la situation était calme dans la capitale. «Aucun incident grave» n'a marqué l'élection jeudi, selon la police et la Céni. «Somme toute, le scrutin s'est déroulé très bien», a déclaré dans la nuit de jeudi à vendredi le commissaire principal de la police Abalo Assih, évoquant «plus de rumeurs que d'incidents». Neuf personnes ont été interpellées dans le pays, a-t-il indiqué. Il y a cinq ans, une vague de violences avait éclaté à Lomé après l'annonce de la victoire contestée de Faure Gnassingbé, faisant 400 à 500 morts selon le bilan de l'ONU. Selon Amnesty international, des militaires avaient attaqué les domiciles de présumés opposants avant et après le scrutin, bastonnant à coups de gourdin ou tuant à balles réelles. Mais, jeudi, même l'opposant historique Gilchrist Olympio, président de l'Union des forces du changement (UFC), a estimé que le scrutin marquait «peut-être le début de la démocratisation du pays». «Je crois que ce qui s'est passé en 2005 est un mauvais chapitre de notre histoire et que c'est une page qui est tournée», a déclaré M.Olympio, 73 ans, sur la chaîne de télévision nationale. Ses propos contrastaient avec ceux du candidat de son parti, Jean-Pierre Fabre, député de 58 ans, qui avait mis en garde contre toute fraude, assurant que «la volonté de changement avait été unanimement exprimée par les populations» durant la campagne. Tout au long de la nuit électorale, observateurs et représentants des partis ont souligné à la télévision le «calme» ayant globalement prévalu. Dans certains bureaux de Lomé, où l'opposition semblait en position de force, le dépouillement s'est fait jeudi soir à la lumière de bougies ou de lampes à pétrole, dans des salles de classe délabrées. De jeunes hommes surexcités s'agglutinaient aux fenêtres pour surveiller de près les opérations et criaient: «43 ans, ça suffit!». De son côté, Faure Gnassingbé ne s'est pas exprimé depuis son vote jeudi dans une école du camp portant le nom de son père, le général Eyadema, qui avait dirigé le Togo d'une main de fer pendant 38 ans (1967-2005). Le jeune président de 43 ans avait alors souhaité «bonne chance à tous les candidats» et «que le meilleur gagne». Sur son site Internet de campagne, Faure Gnassingbé a promis, s'il était réélu pour un nouveau quinquennat, de «sortir définitivement le Togo de l'impasse politique et économique où il se trouvait», et de «consolider la démocratie et l'Etat de droit». Dans ce petit pays de 6,5 millions d'habitants, ex-colonie allemande puis française, la majeure partie de la population vit encore sous le seuil de pauvreté.