L'interdiction des minarets en Suisse a ravivé le sentiment chez certaines parties extrémistes qui s'opposent à la construction de la mosquée. La construction de la grande mosquée de Marseille ne connaîtra pas de sitôt le bout du tunnel. Ce vieux projet, ressorti du tiroir, souffre déjà du problème de financement. «Nous avons des difficultés à trouver des bailleurs de fonds pour démarrer les travaux», a déploré le président du Conseil régional du culte musulman pour la région Paca. Selon Abderrahmane Ghoul, la pose de la première pierre de la mosquée devra intervenir au courant du mois de mai prochain. «Tout est fin prêt pour le démarrage des travaux mais les caisses sont vides», affirme M.Ghoul avec inquiétude. Et d'ajouter: «Nous n'avons que des promesses de financement». Selon lui, le permis de construire et toute la partie technique ont été réalisés grâce au chèque octroyé par le consulat d'Algérie à Marseille. Pour sa première contribution, l'Algérie a remis en 2008 une enveloppe 170.000 euros. Estimé à 22 millions d'euros, la construction de la grande mosquée de Marseille est loin d'être une mince affaire. Le règlement arrêté dans le cadre du financement complique davantage la tâche. «Le financement ne doit pas dépasser le seuil de 25%», précise M.Ghoul. Un tel règlement a été adopté dans le but d'éviter la mainmise d'un quelconque pays, souligne-t-il. «C'est un projet rassembleur de la communauté musulmane établie à Marseille», a-t-il indiqué avant de fermer la parenthèse. Selon lui, l'Arabie Saoudite s'est dit prête à financer entièrement ce problème, mais l'offre ne convient pas au règlement. Ainsi, et avec la crise financière qui a fragilisé les économies, notre interlocuteur reconnaît la difficulté de trouver des ressources financières. Des contacts ont été entrepris avec les différents pays musulmans. «Si nous voulons que la première pierre soit posée prochainement, il faut au moins avoir le tiers du budget», a-t-il exigé. Ainsi, le rêve est loin d'être une réalité pour la communauté musulmane de Marseille. Estimée à plus de 250.000 âmes, la communauté musulmane marseillaise est constituée beaucoup plus d'Algériens, au nombre de plus de 90.000 personnes, suivis des Comoriens, des Tunisiens, des Africains et des Marocains. Ces musulmans devront attendre quelques années pour ne pas dire une décennie pour avoir leur propre lieu de culte digne de cette ville. C'est ce qui explique la taille du projet. D'une superficie de 2500 m² avec un minaret de 25 mètres, la mosquée pourra accueillir 5000 fidèles. Elle sera également dotée d'une bibliothèque, d'une librairie, d'une école coranique et d'un restaurant, ainsi que d'un amphithéâtre et de salles d'expositions. De quoi ravir les musulmans de Marseille. Or, en plus du problème financier, se pose une autre contrainte. Les réactions s'opposant à sa construction continuent de se manifester. M.Ghoul avoue que la thèse de l'interdiction des minarets en Suisse a ravivé le sentiment chez certaines parties extrémistes qui s'opposent à la mosquée. «Nous recevons beaucoup d'attaques et d'objections sur la construction du minaret», a-t-il précisé tout en assurant de la volonté du maire de Marseille à mener à bon port ce projet. Avant-hier, une centaine de personnes se sont rassemblées à Marseille à l'appel des mouvements d'extrême droite de la Ligue du Sud et des Identitaires pour dénoncer «l'islamisation», selon eux, de cette ville. Le rassemblement s'est déroulé en contrebas de la basilique Notre-Dame-de-la-Garde, lieu emblématique de la ville. L'ex-FN et ex-MPF de Jacques Bompard, chef de file de la Ligue du Sud aux régionales en Provence-Alpes-Côte d'Azur (Paca), a expliqué avoir choisi ce lieu emblématique pour réagir à la construction «d'une mosquée-cathédrale qui va changer la nature même de la ville». Certains des manifestants portaient des pancartes proclamant: «Avec ou sans mosquée, pas de minarets dans nos quartiers.» En guise de réplique, une manifestation a été organisée à l'appel de SOS-Racisme et du PCF qui ont dénoncé la haine et l'incitation à la haine.