Les sociétés de télécommunications ratent les opportunités de développement à cause de l'instabilité du management. Démission ou limogeage. Etre manager d'une entreprise publique n'est pas un poste fait pour durer. La dernière entité à faire les frais de la valse des dirigeants est Mobilis. Son directeur, M.Mehmel Azouaou, a démissionné de son poste. Il n'était désigné à cette fonction que le 21 décembre de l'année dernière au cours d'une assemblée générale. C'était le ministre des Postes et des Technologies de l'information et de la communication, Hamid Bessalah, qui avait été à l'origine de la nomination de cet ingénieur en télécommunications. Il a occupé plusieurs postes de responsabilité, notamment ceux de directeur des transmissions à Mobilis et de divisionnaire commercial à Algérie Télécom. Il avait succédé à ce même poste à Lounis Belharrat. L'instabilité du management est donc une tradition dans cette société. Elle active pourtant dans un environnement concurrentiel et a, de ce fait, tant besoin d'une vision à long terme pour tirer son épingle du jeu. Cette tâche, même l'ancien directeur général, El Hachemi Belhmadi, a eu du mal à la mener à bon port. Malgré tout, Mobilis a réussi à séduire 10 millions de clients devançant ainsi Wataniya avec 8 millions d'abonnés. L'Agence de régulation des postes et télécommunications place Orascom Telecom Algérie à la première place avec 14 millions d'abonnés. Tout cela a fait que le taux de pénétration de la téléphonie mobile est de 91,68%. Sur 100 habitants, il y a 92 personnes qui sont abonnées chez un des opérateurs. 95% des parts de marché sont en prépayé. Les responsables de Mobilis qui n'est qu'une filiale d'Algérie Télécom, ont achevé leur carrière dans l'entreprise avec peu de fracas. Ce n'est pas le cas de l'entreprise mère. Quatre de ses responsables successifs ont eu des problèmes avec la justice. Slimane Kheirdine, Mouloud Djaziri, Brahim Ouarets et Messaoud Chettih sont de ceux-là. Et certains ont même fait de la prison, entre autres, pour dilapidation de biens publics. Les ministres successifs qui ont eu à gérer le secteur des télécommunications n'ont pas stabilisé le management. Amar Tou et Boudjemaâ Haïchour sont passés par là. Il semble bien que le dernier à être à la tête du secteur, Hamid Bessalah, ne s'en sort pas mieux. La malédiction qui frappe les entreprises en charge des télécommunications a aussi fait des victimes à Algérie Poste. C'est Ghania Houadria qui a eu maille à partir avec son ministre de tutelle avant d'être limogée. De tout temps, les spécialistes ont relevé que l'autonomie de ces sociétés n'est que virtuelle puisque les ministres ont toujours eu à s'immiscer dans leur gestion. Il y avait même un temps où pour disposer d'une puce de téléphone portable, il fallait avoir l'onction d'un ministre. Il a fallu longtemps pour que la société sorte de sa torpeur et qu'elle se lance dans une chasse à l'abonné. Les efforts ont été récompensés sans pour autant porter chance à ses dirigeants. «Et que chacun parle», slogan phare de Mobilis, ne tardera à être tourné en dérision pour être décliné en une nouvelle formule: «Et que chacun parte.» A un moment où il fallait au contraire continuer à mettre à profit l'expansion du marché et gagner de nouveaux clients. Il y a également tous les nouveaux services qui restent à développer avec les nouvelles utilisations ouvertes grâce au téléphone portable. Les clients ne demandent qu'à être rassurés en ayant à l'esprit l'idée selon laquelle le management est là pour les entendre et les satisfaire. Mais les bruits qui circulent autour d'une nouvelle réforme du secteur tendant à réduire les prérogatives des gestionnaires, n'ont pas été du goût de ces derniers. Et certains d'entre eux n'ont pas tardé à le faire savoir. Avec fracas. En tous les cas, la valse des dirigeants d'entreprises et d'établissements publics à caractère administratif n'est pas nouvelle. Des structures de ministères et des autres services publics sont habitués à des changements brusques. Tout comme les sociétés du secteur économique. Avec le risque que cela engendre l'immobilisme.