La reprise du trafic aérien s'est confirmée hier en Europe, mais le retour à la normale prendra encore longtemps pour les centaines de milliers de passagers coincés à travers le monde suite à cette crise dont le coût pourrait se chiffrer en milliards d'euros. Le volcan islandais Eyjafjöll, dont l'éruption a provoqué depuis une semaine un chaos jamais vu dans le transport aérien mondial, semblait de son côté enfin vouloir se calmer. L'intensité de l'éruption a chuté de 80% depuis samedi et la production de cendres était hier, selon les sismologues islandais, «vraiment insignifiante». C'est justement le nuage de cendres craché par le volcan, baladé au gré des vents de l'Atlantique jusqu'à l'ouest de la Russie, qui a cloué au sol les avions et laissé sur le carreau des millions de voyageurs, dont 6500 soldats de l'Otan qui n'ont pu gagner l'Afghanistan. Laissant entrevoir la fin de la galère, pour la première fois depuis près d'une semaine, les trois quarts du trafic aérien, soit environ 21.000 vols, devaient être assurés en Europe hier, selon l'Organisation européenne de la navigation aérienne, Eurocontrol. British Airways et Air France, deux géants du secteur, prévoyaient 100% de leurs long-courriers, Lufthansa un tiers de ses liaisons. Quasiment tout l'espace aérien continental était rouvert, à quelques exceptions près. L'aéroport d'Helsinki a ainsi de nouveau fermé à la mi-journée jusqu'à au moins 18h00 GMT, comme l'espace aérien au-dessus des îles au nord de l'Ecosse. «Je n'ai jamais été aussi heureux de ma vie de rentrer à la maison», soufflait Shahriar Ravari, un habitant de San Diego (Etats-Unis), coincé depuis plusieurs jours à Paris et qui attendait à l'aéroport un vol pour Los Angeles. «J'adore la France, mais rentrer, c'est autre chose.» Mais malgré la reprise des vols, gouvernements, autorités de l'aviation et compagnies aériennes ont averti qu'il faudrait des jours, voire des semaines, pour que tout revienne à la normale et que les centaines de milliers de voyageurs encore en souffrance puissent regagner leurs destinations. Alors que la paralysie européenne s'est répercutée dans le monde entier, les vols depuis l'Asie - dont les compagnies aériennes estiment avoir perdu 40 millions de dollars par jour - ont repris vers le Vieux Continent. A l'aéroport Incheon de Séoul, les salons VIP transformés en dortoirs de fortune pour les naufragés du ciel commençaient à se vider. «Nous leur avons donné des matelas et des oreillers, de l'eau et trois repas pas jour. Gratuitement», expliquait Yoon Han Young, responsable de la clientèle. A Sydney, la queue atteignait 200 mètres pour l'embarquement sur un vol British Airways. «Les gens n'en peuvent plus. On ne se rend pas compte comme c'est difficile», lâchait Jane Gershfield, passeport et billet à la main. A Islamabad, le porte-parole de Pakistan International Airlines estimait qu'il «faudrait deux à trois semaines» pour que les 18.000 clients de la compagnie restés bloqués gagnent tous leur destination. Car les problèmes étaient encore légion. «On a reçu un appel de Gulf Air hier soir (mardi) nous confirmant un vol pour Heathrow ce matin (hier). On a quitté notre hôtel où nous étions depuis vendredi mais Gulf Air nous affirme maintenant que c'est une fausse information!», fulminait Maira Benicio, une Brésilienne de 28 ans coincée à Delhi et qui cherchait à rejoindre Barcelone, où elle vit, via Londres. Les compagnies aériennes, dont les pertes de recettes atteignent selon l'Association internationale du transport aérien (IATA) 1,7 milliard de dollars, ont accusé les gouvernements d'avoir réagi à l'excès en interdisant purement et simplement le trafic aérien au motif que les cendres volcaniques peuvent endommager les réacteurs des appareils. Or, l'Organisation de l'aviation civile internationale (Oaci) a souligné qu'il n'y avait pas, pour le moment, de normes internationales fixant le niveau dangereux de concentration de cendres volcaniques.