La pilule s'annonce amère pour les Grecs, avec de nouveaux coups portés à leur pouvoir d'achat, déjà entamé par la récession. La Grèce a conclu avec le FMI et les Européens un accord lui imposant de «grands sacrifices», en contrepartie d'une aide financière «sans précédent au niveau mondial» pour la sauver de la banqueroute, a annoncé hier le Premier ministre Georges Papandréou. «Ce sont des sacrifices durs mais nécessaires (...) sans lesquels la Grèce ferait faillite», or «éviter la faillite est la ligne rouge nationale», a déclaré le Premier ministre à l'ouverture d'un Conseil des ministres, en prévenant qu'une «grande épreuve» attendait le pays. Le montant global de l'aide du Fonds monétaire international et des pays de la zone euro sera «sans précédent au niveau mondial», a ajouté M.Papandréou, sans donner de chiffre. Le déblocage de ce soutien financier, qui doit dépasser 100 milliards d'euros sur trois ans, devait être débattu dans l'après-midi d'hier à Bruxelles par les ministres des Finances des pays ayant adopté la monnaie unique. Après des semaines de tractations qui ont mis à rude épreuve la zone euro et agité les marchés, il devrait suffire, estiment des économistes, à éviter à la Grèce, confrontée à une dette colossale de plus de 300 milliards d'euros, un défaut de paiement sur le moyen terme. Mais la pilule s'annonce amère pour les Grecs, avec de nouveaux coups portés à leur pouvoir d'achat, déjà entamé par la récession. Selon le Premier ministre, les nouvelles mesures d'austérité concernent les fonctionnaires et les retraités du secteur public, et épargnent le secteur privé. «Avec nos décisions d'aujourd'hui les citoyens doivent subir de grands sacrifices (...) ce n'est pas une décision agréable», a ajouté, sur un ton solennel, Georges Papandréou. Les négociations entamées le 21 avril à Athènes entre le gouvernement, le FMI, la Commission et la Banque centrale européennes ont abouti samedi soir. L'accord conclu porte à la fois sur les prêts que débloqueront les partenaires européens et le FMI, pour permettre à la Grèce de continuer à rembourser sa dette, et sur les conditions imposées en contrepartie à Athènes. Selon Paris, le soutien international atteindra un montant de 100 à 120 milliards d'euros sur trois ans. Surtout, les prêts pourront a priori commencer à être versés juste à temps pour que l'Etat hellénique honore l'échéance cruciale du 19 mai, quand il devra rembourser près de 9 milliards d'euros à ses créanciers. Les taux des obligations d'Etat grecques, qui se sont envolés de manière spectaculaire au fur et à mesure que l'incertitude des marchés montait sur le sort du pays, sont désormais jugés «prohibitifs» par Athènes, qui a donc décidé le 23 avril de demander le déclenchement de l'aide internationale. Face aux hésitations de certains de ses partenaires, Allemagne en tête, et à l'opposition farouche des syndicats aux mesures de rigueur annoncées, le gouvernement a tenté ces derniers jours de dramatiser l'enjeu. Georges Papandréou a martelé qu'il en allait de la «survie de la nation» et qu'Athènes n'avait d'autre choix que d'accepter de faire de nouvelles économies. Selon les syndicats, ces économies pourraient atteindre jusqu'à 25 milliards d'euros sur les prochaines années, ce qui permettrait de ramener fin 2012 autour des 3%, le seuil européen, le déficit public grec qui a atteint en 2009 près de 14% du PIB. Un tel effort n'a jamais été réalisé par aucun pays de la zone euro. Les syndicats entendent mobiliser massivement mercredi lors de la troisième grève générale en moins de trois mois, après un test mitigé samedi à l'occasion du 1er mai qui a réuni 15.000 personnes à Athènes pour une manifestation émaillée de quelques incidents. Les nouvelles mesures devraient inclure d'importantes coupes salariales, une réforme sévère des retraites et une nouvelle hausse de un à deux points de la TVA, déjà élevée (21%). Elles devaient être détaillées devant la presse, à l'issue du Conseil des ministres, par le ministre des Finances Georges Papaconstantinou, qui partira ensuite pour Bruxelles, où une réunion de ses homologues de la zone euro était convoquée pour l'après-midi d'hier. Les ministres de la zone euro doivent donner leur feu vert au plan de sauvetage, avant que leurs chefs d'Etat ou de gouvernement ne fournissent l'aval définitif au déblocage des prêts, probablement lors d'un sommet vendredi ou samedi. Le risque de contagion de la crise à d'autres pays lourdement endettés de la zone euro, comme le Portugal ou l'Espagne, a fini par vaincre les réticences de Berlin, longtemps hostile à apporter son aide à la Grèce, coupable d'avoir dépensé sans compter ses deniers publics en cachant ses déficits abyssaux.