Le secrétaire général de l'Organisation nationale des moudjahidine a tiré à boulets rouges sur Bernard Kouchner, le chef de la diplomatie française. A la veille du 65e anniversaire des massacres du 8 Mai 1945, le débat sur la criminalisation du colonialisme fait rage. Hier, c'était au tour de Saïd Abadou, secrétaire général de l'Organisation nationale des moudjahidine (ONM), de réitérer son soutien au projet de loi criminalisant le fait colonial de la France en Algérie. «Ce projet de loi est une réponse à la loi du 23 Février 2003, votée par le Parlement français et qui glorifie le colonialisme. Il traduit une aspiration profonde du peuple algérien de reconnaissance et de condamnation des crimes commis à son encontre par la France occupante», a déclaré M.Abadou, sur les ondes de la Chaîne I de la Radio nationale. Seulement, ce projet tarde à être adopté. D'ailleurs, il figure parmi les points sensibles que les parlementaires se proposent d'examiner, lors de la session de printemps. «Ma conviction est faite que les représentants du peuple feront en sorte de faire aboutir ce projet de loi», a affirmé l'invité de la Radio. A l'évidence, le représentant de l'ONM met la pression sur les parlementaires pour dépoussiérer le dossier mis sous le coude au niveau de l'Exécutif. Le délai de deux mois accordé au gouvernement pour examiner et adopter la mouture finale de ce texte a expiré à la fin avril et aucune suite n'a été donnée à la proposition des députés. Seulement, il semblerait qu'au niveau de l'APN, rien n'a été entrepris dans ce sens. La sensibilité du texte réside dans le contenu des revendications à l'adresse de l'ancienne puissance coloniale. Ainsi, l'article 4 du projet de loi prévoit l'instauration d'un tribunal criminel algérien qui sera spécialement créé dans le but de juger tous les criminels de guerre et les crimes contre l'humanité. Ce tribunal aura la compétence de juger toute personne ayant commis ou participé à tout acte contre le peuple algérien. «Ces revendications sont légitimes. D'autant que la France elle-même a eu droit à la reconnaissance par l'Allemagne, des crimes nazis», a renchéri l'intervenant. Pour faire aboutir l'initiative, des voix se sont élevées. Elles ont préconisé une politique offensive contre l'Etat français. Sur ce plan, M.Abadou s'est montré réservé. «Nous sommes en position de défense de notre dignité. C'est, plutôt, l'Etat français qui nous a provoqués», a estimé le représentant de l'ONM. Cela dit, il a été d'une virulence inouïe à l'égard de Bernard Kouchner, ministre français des Affaires étrangères. «Il est absurde de dire que les relations algéro-françaises s'amélioreraient avec le départ de la génération de Novembre des sphères de décision», a fulminé M.Abadou. Le chef de la diplomatie française a eu droit, ainsi, à une réponse à ses déclarations. Par ailleurs, M.Abadou s'est étalé sur le problème des essais nucléaires français en Algérie. Il a qualifié la non-remise des cartes de l'emplacement des déchets nucléaires, à l'Algérie, par la France, de «crime post-indépendance». Sur un autre plan, M.Abadou a préconisé l'attribution du statut de martyr aux victimes des boucheries du 8 Mai 1945. A l'évidence, le passé continue de peser lourd sur les relations algéro-françaises.