En annonçant la nouvelle, invérifiable toutefois, le Rodong n'a fait cependant aucune allusion à un éventuel usage militaire de cette technologie permettant de fabriquer des engins thermonucléaires. La Corée du Nord a revendiqué hier un succès en matière de fusion nucléaire, célébré comme une «percée décisive» vers de nouvelles sources d'énergie, mais des scientifiques ont douté de cette affirmation dans un pays parmi les plus pauvres du monde. «La fusion nucléaire couronnée de succès est un grand événement qui illustre le développement rapide et à la pointe des sciences et des technologies de la République populaire démocratique de Corée (RPDC)», s'est félicité le Rodong Sinmun, organe officiel du régime qui revendique déjà la possession de la bombe A, basée sur la fission nucléaire. L'énergie nucléaire peut être libérée de deux façons: en cassant des noyaux atomiques lourds, la fission, ou en fusionnant des noyaux très légers, la fusion. Si la fission est contrôlée depuis longtemps pour la production d'électricité, ce n'est pas encore le cas de la fusion, car il s'agit de fusionner deux noyaux atomiques qui ont tendance à se repousser. En annonçant la nouvelle, invérifiable toutefois, le Rodong n'a fait cependant aucune allusion à un éventuel usage militaire de cette technologie permettant de fabriquer des engins thermonucléaires («bombe H»). Sans livrer de plus amples détails, le journal a assuré que la Corée du Nord avait réalisé cette avancée à force de labeur et «à la manière coréenne». Mais des experts sud-coréens ont mis en doute sa véracité dans un pays régulièrement en proie à des pénuries alimentaires et des coupures d'électricité. «La Corée du Nord a peut-être commencé à mettre en oeuvre une fusion magnétique à petite échelle, mais vous ne pouvez pas comparer cela avec notre réacteur Kstar (Korea Superconducting Tokamak Advanced Research) ou bien avec d'autres réacteurs dans le monde», a déclaré Yang Hyung-Lyeol de l'Institut national de recherche sud-coréen sur la fusion nucléaire. Séoul est partenaire du vaste projet international de réacteur expérimental de fusion thermonucléaire (Iter) qui réunit l'Union européenne, Japon, Chine, Russie, Etats-Unis, Corée du Sud et Inde. Il vise à prouver que la fusion thermonucléaire peut fournir de l'énergie au monde. «Je ne pense pas que la Corée du Nord dispose de technologies que nous ignorons. Si c'était le cas, elle serait en avance sur le reste du monde», a-t-il ajouté. Un autre expert sud-coréen en fusion nucléaire a également affiché son scepticisme sur la «percée» du Nord, qui selon lui, menait des expérimentations dans ce champ depuis début 2000. «(...) Je ne pense pas que le Nord ait les infrastructures dont les autres pays développés et nous-mêmes disposons», a estimé Lee Choon-Geun de l'Institut de sciences et de technologie financé par l'Etat. La Corée du Nord, qui a procédé depuis 2006 à deux essais nucléaires, a mis au point un programme d'armement à base de plutonium et possèderait «entre une et six armes nucléaires», selon les Etats-Unis. En septembre 2009, Pyongyang avait annoncé pour la première fois être parvenu à la phase finale du processus d'enrichissement d'uranium, l'autre technologie de fabrication de l'arme atomique. La communauté internationale tente de ramener la Corée du Nord aux négociations sur son programme de dénucléarisation, entamées en août 2003. Pyongyang s'était retiré en avril 2009 de ces laborieuses tractations après un tir de missile controversé sanctionné par le Conseil de sécurité de l'ONU. Le régime fait toujours de la signature d'un traité de paix avec les Etats-Unis le préalable d'une reprise des négociations. Le Nord a déjà affirmé maintes fois par le passé qu'il était disposé à revenir aux discussions «par le biais du dialogue», mais ses engagements ont été jusqu'ici de courte durée.