Stora propose avec Le Mystère De Gaulle, une nouvelle lecture de l'une des plus importantes décisions que le général ait prise concernant l'Algérie. «De nombreux groupes de pression veulent absolument conserver leur point de vue (concernant la Guerre d'Algérie). Ils n'arrivent pas à traverser le miroir et essayer de comprendre le point de vue des autres», a déclaré l'historien français, Benjamin Stora, lors d'une conférence de presse organisée, avant-hier, à la Librairie du Tiers Monde et ce, à l'occasion de la réédition de son dernier livre Le Mystère De Gaulle, son choix pour l'Algérie chez les éditions Sédia. «L'histoire de la Guerre d'Algérie reste extraordinairement brûlante», a noté l'historien. C'est ce qui a donné lieu, d'ailleurs, aux polémiques suscitées de part et d'autre de la Méditerranée. Celles-ci ont toutes un point en commun: la Guerre d'Algérie. En effet, c'est le cas de la controverse suscitée sur la venue de la caravane célébrant le cinquantenaire de la mort de Camus est significative. Une violente levée de boucliers a eu lieu en vue de l'interdiction pure et simple de cette manifestation qui a attisé les ardeurs de certains en Algérie. En France, c'est le dernier film de Rachid Bouchareb, Hors-la-loi, qui a provoqué la polémique. Relatant les massacres du 8 Mai 1945, certains politiques de la droite française et des associations de pieds-noirs et des harkis avaient protesté contre la projection de ce film au Festival international de Cannes. Ce long-métrage était perçu comme étant une falsification de l'Histoire. «Il y a une espèce de brûlure qui a du mal à se cicatriser», relève-t-il, concernant les Français d'Algérie. «Les Algériens ont acquis leur indépendance, c'est plus difficile pour les Français qui ont perdu l'Algérie», a-t-il ajouté. Interrogé sur l'initiative prônée par certains politiciens français et quelques historiens pour créer un centre où des chercheurs algériens et français travailleront ensemble pour la réécriture de l'histoire de la Guerre de l'Algérie, Stora fait remarquer: «Ça a été déjà fait, j'ai travaillé avec Mohamed Harbi, on a dirigé une trentaine de chercheurs, algériens et français. Mais à mon sens, cela ne pourra éteindre complètement les passions. Elles sont encore trop vives, il y a trop de blessures et puis il y a surtout la non-reconnaissance de l'autre. C'est ce qui est difficile, tant qu'il n'y a pas de reconnaissance de l'autre, sur le plan humain, politique, culturel, celui-ci aura toujours le sentiment d'être blessé.» S'agissant du choix de De Gaulle, qui constitue le thème central de son dernier livre, Benjamin Stora fera observer: «Le premier objectif de De Gaulle était de revenir au pouvoir. Mais une fois au pouvoir, il savait que le statu quo était impossible...Il voulait sortir de l'immobilisme, et en même temps...». La solution fédérale qu'il voulait adopter au début, ne pouvait être concrétisée. «Il n'a pas été là où il voulait aller au départ. De Gaulle voulait garder le Sahara pour le pétrole et le gaz et continuer les expériences nucléaires françaises, mais ce projet était avorté, on est arrivé à l'indépendance».