Histoire n L'historien Benjamin Stora est l'auteur de plusieurs ouvrages consacrés notamment à l'Algérie et, en particulier, au mouvement nationaliste et à la Guerre de Libération nationale. Invité des éditions Sedia où deux de ses livres La gangrène et l'oubli : la mémoire de la guerre d'Algérie et Le mystère De Gaulle : son choix pour l'Algérie, Benjamin Stora, pour qui «l'écriture de l'histoire doit impérativement répondre aux questionnements du présent», a animé, hier, une rencontre à la librairie du Tiers-monde, à l'issue de laquelle il a signé une vente-dédicace. S'exprimant sur son dernier livre Le mystère De Gaulle : son choix pour l'Algérie, Benjamin Stora, pour qui De Gaulle est «un écrivain, un grand stratège politique, un grand personnage», dira : «C'est une figure incontournable et il était évident qu'au bout d'un moment, j'allais le croiser.» «C'est un personnage qui m'a énormément intéressé», ajoute-t-il, précisant : «J'ai tenu à la remettre à sa juste place dans une perspective historique.» Il a, ensuite, indiqué : «Je considère le genre biographique comme particulièrement important pour comprendre l'histoire.» Dans cet ouvrage, sorti en France en 2009, Benjamin Stora revient, grâce à De Gaulle, sur un épisode important de la vie du général, à savoir le 16 septembre 1959, où, dans un discours, il a ouvert la voie à l'indépendance de l'Algérie. C'est ainsi que l'auteur livre au lecteur une face cachée de la décision qu'aurait prise De Gaulle en faveur de l'autodétermination de l'Algérie. Il s'est donné alors l'ambition «d'élucider le mystère» du général De Gaulle, ou plutôt l'énigme apparente, qui a fait que, appelé au pouvoir par les partisans de l'Algérie française, il a finalement octroyé l'indépendance à l'Algérie. «Il y a bien, en effet, un mystère dans cette proposition de l'autodétermination faite dans son discours du 16 septembre 1959», dira Benjamin Stora, et de poursuivre : «Le général de Gaulle avait arrêté sa position sur une sortie du statu quo colonial depuis plusieurs années.» Benjamin Stora retient dans son livre cinq raisons stratégiques qui, selon lui, ont influencé la décision du général De Gaulle d'accorder l'indépendance à l'Algérie : doute sur la possibilité de l'intégration, la difficile victoire par les seules armes, l'immigration algérienne active, une guerre trop chère et enfin sortir la France de l'isolement international. En revanche, Benjamin Stora souligne avec raison dans son livre les risques pris par le général De Gaulle en toute conscience, à savoir la division de l'armée, le sacrifice des musulmans pro-Français, comme il voit également un ultime danger : «le risque de la constitution d'une entité indépendante algérienne-française autonome séparatiste, sur une portion du territoire algérien, qu'aurait envisagé des cercles militaires et français par mimétisme du modèle sud-africain d'apartheid.» Enfin, Benjamin Stora a estimé que «la nation est, sans arrêt, dans un processus de construction, faisant qu'elle se définit tout le temps par son rapport à l'histoire», car «une nation, dont l'idée est arrêtée, figée et qui ne s'ouvre pas au débat, se situe dans le totalitarisme».