Il ne s'agissait pas du tournage d'un film mais d'un fait réel. Un spectacle choquant s'est produit, hier, devant le Parlement. Un père de famille, accompagné de ses trois enfants, a failli se suicider devant l'institution parlementaire. Ancien policier et victime du terrorisme, ce père de cinq enfants, sans abri, a voulu mettre fin à son calvaire une bonne fois pour toute. Il était à peine 12h30 quand un cri de détresse a été lancé de l'extérieur de l'Assemblée. Du haut du mur donnant sur la voie ferré, ce père de famille s'apprêtait au suicide. «Ya nass, j'en ai ras-le-bol, je vais me suicider, je n'ai aucune raison de vivre», criait-il en tenant ses enfants. La scène était terrible. Un père avec deux garçons et une fille pleuraient leur mauvais sort. «Ya Bouteflika, le logement ou le suicide, ancien flic victime de terrorisme, sans abri», lit-on sur la pancarte tenue par sa fille, à peine cinq ans. Terrifiés et choqués, les enfants ont éclaté en sanglots en voyant leur père dans cet état. Cet ancien policier n'avait d'autre choix que d'étaler sa détresse en public dans l'espoir d'être entendu. «J'ai frappé à toutes les portes et personne n'a voulu me répondre, il ne me reste que le suicide», s'acharne-t-il avec un sang-froid. Sur place tout le monde était sous le choc. L'information s'est propagée comme une traînée de poudre à l'intérieur de l'APN. Les fonctionnaires ont tous accouru aux fenêtres pour voir la scène. «C'est affreux et c'est malheureux d'en arriver là», déplore une dame de l'APN, les larmes aux yeux. L'image des enfants qui pleuraient était tellement émouvante que tout le monde s'est mis à pleurer. «Ya hlil, il faut être à sa place pour avoir le courage de se donner la mort avec ses enfants», commente sa collègue, les larmes emplissant ses yeux. Personne n'est resté indifférent devant cette scène. Même les hommes n'ont pu se retenir. «El-hogra, c'est difficile», affirme un agent, les yeux larmoyants. «Se retrouver sans abri et sans travail avec une famille sur le dos, pousse à commettre l'irréparable», poursuit-il. Son ami secouait sa tête en disant: «S'il touchait un salaire de 30 millions, il ne ferait jamais cela». Salarié et célibataire, cet agent reconnaît qu'il a du mal à joindre les deux bouts. «Voilà la vraie réalité amère qu'il faut rapporter et non pas les débats moroses», nous suggère-t-il. Sur place, une foule importante s'est rassemblée suscitant davantage la curiosité des automobilistes. La scène a duré près d'une heure. Malgré les sollicitations des policiers et des députés qui le suppliaient de descendre, le père de famille n'a pas cédé de suite. Des députés, des agents de la sécurité de l'APN et des policiers le priaient de renoncer en lui promettant de le prendre en charge, mais en vain. Il a fallu insister plus de trois quarts d'heure pour éviter le pire. Le député FLN, Djemaï et son collègue Noureddine Aït Hamouda du RCD ont réussi à le dissuader. Pour le rassurer, les députés l'ont accueilli dans leur bureau et lui ont promis un travail et un logement. Comme ce père de famille, ils sont des milliers à souffrir de la marginalisation et de la hogra d'où les mouvements de protestation qui ne cessent de se multiplier.