L'économie algérienne reste partagée entre le vert de sa stabilité macro-financière et le rouge des demandes sociales. Des auditions organisées par la commission Evaluation du Conseil national économique et social (Cnes) au titre de la préparation du rapport sur la conjoncture du premier semestre 2002 rendues publiques hier, il ressort que l'évolution économique et sociale du pays reste encore tributaire des mêmes contraintes qui ralentissent le décollage de l'économie nationale depuis quelques années. Tenues sous la présidence du premier responsable du Cnes, M.Mohamed Salah Mentouri, en présence des principaux ministres concernés, des partenaires sociaux et des organisations patronales, ces auditions des conseillers de la commission Evaluation ont permis de recueillir, auprès des différents départements ministériels et institutions, les données chiffrées et les indicateurs qui ont déterminé et/ou pesé sur la conjoncture du premier semestre 2002. Dans le communiqué de presse relatif à cette évaluation il est écrit: «Globalement, la conjoncture du premier semestre n'a pas connu d'inflexion significative au niveau des résultats enregistrés, avec la persistance des mêmes contraintes pour l'économie nationale et ce, en dépit d'une aisance financière consolidée.» Par secteur, et selon ce «prérapport» du Cnes: «En contexte d'une substantielle impulsion budgétaire, la croissance tirée essentiellement par les BTP et les services, demeure modeste et inégalement répartie entre les secteurs, en notant le recul de la croissance dans l'agriculture, particulièrement affectée par la sécheresse.» Plus exactement il est relevé que «la mauvaise performance du secteur agricole est venue atténuer les motifs de satisfaction qu'avait laissé espérer la mise en oeuvre du PNDA». S'agissant des grands équilibres financiers du pays sur lesquels repose tout l'échafaudage économique et social de l'Exécutif depuis des années, il est relevé que «l'évolution, encore favorable des indicateurs monétaires et financiers confirme la stabilité macro-financière retrouvée depuis l'année 2000 et la bonne viabilité à moyen terme de la balance des paiements, grâce à une augmentation et une accumulation substantielles des réserves de change». Cependant, est-il noté, «l'accroissement des liquidités au niveau des banques n'a pas induit, dans les proportions espérées, d'engagement dans le financement de l'investissement». Quant au péril qui guette toutes les économies monétaristes dans le monde, en l'occurrence, l'inflation, le Cnes considère que «c'est un sujet de préoccupation qui demeure vivace, malgré une tendance au ralentissement enregistré de son taux (l'inflation) avec 3,2% (contre 4,2% pour le premier semestre 2001)». Mais c'est le secteur industriel, colonne vertébrale de toute économie saine et performante, qui «poursuit sa dérive», qui continue de susciter les interrogations et les inquiétudes quant à la politique poursuivie pour son assainissement. Selon le texte du communiqué du Cnes, au cours de la réunion de la commission d'évaluation, «l'accent a été mis sur les incertitudes affectant l'avenir du secteur public industriel», alors que dans le même temps, «la production du secteur industriel privé, dont l'évaluation demeure approximative, voire aléatoire, n'a pas enregistré d'augmentation significative». Par ailleurs, et concernant les grandes infrastructures de base devant équiper tout pays aspirant à un développement global, il est mentionné que «le secteur des travaux publics, en dépit de son caractère stratégique et de son ambitieux programme de développement, se heurte à diverses entraves, dont, paradoxalement, une insuffisance de crédits». Une situation qui s'est traduite par «des déficits et des retards accumulés qui risquent à brève échéance, de conduire à des situations extrêmement tendues et à une augmentation importante des coûts du transport». Plus globalement et appréciant le plan de soutien à la relance économique, le Cnes relève que «plus d'une année après son lancement, ce plan n'a pas réussi à susciter une dynamique de mobilisation, et revêt souvent des formes conventionnelles d'opérations ordinaires et sans profondeur stratégique». L'organisme d'évaluation de la politique économique et sociale du gouvernement note, cependant, qu'«il a été enregistré un climat social relativement peu tendu avec toutefois la persistance des revendications principales, liées aux salaires, au logement, à l'amélioration du cadre de vie et aux menaces pesant sur le système de sécurité sociale et de santé publique». En somme, et au vu des appréciations du Cnes, le pays continue de vivre un anachronisme significatif et souvent paradoxal avec un surplus d'argent et un marasme persistant.