Le groupe Dhina-Habes-Filali semble ne plus pouvoir avancer. La pression du groupe algérois de l'ex-FIS l'a, de toute évidence, mis à mal. Dans le calendrier des contacts de Mourad Dhina, figure, en premier, Kamel Guemazi. L'ex-président du Cpwa du temps du FIS l'a, néanmoins, courtoisement «remis à sa place». On ne piétine pas sur les plates-bandes des autres sans avoir à en payer le prix. De fait, Mourad Dhina, président du conseil de coordination du parti dissous, peut encore tourner en rond à la recherche d'appuis, en Algérie même, justifiant encore et toujours sa démarche par la lettre de Abassi Madani et la tenue («réussie», dit-il) du congrès organisé à Bruxelles. Depuis la clôture du congrès, aucune initiative n'a été entreprise par le CC-FIS, malgré le propos jubilatoire de Mourad Dhina. Mieux, plus les jours passent, plus il constate qu'il n'y a pas de quoi pavoiser. La critique très violente opposée par les Ali Djeddi, Boukhamkham, Guemazi, Kébir, Sahnouni et les leaders de l'AIS l'ont pris de court. Ne s'attendant certainement pas à la virulente critique qui a suivi l'organisation du congrès, Dhina, un moment euphorique, puis désarticulé, a fini par afficher un profil bas, et revenir à l'évidence: rien de concret ne peut se faire concernant la mouvance FIS, et encore moins sans la participation des leaders d'Alger. Ni le contexte international, notamment après les restrictions draconiennes survenues depuis les attaques antiaméricaines du 11 septembre 2001, ni l'évolution de la situation sociale et politique du pays, ni les dispositions de la base, ni l'éparpillement de l'intelligentsia islamiste radicale ne plaident en faveur d'une quelconque action pour le moment. Cette constatation faite, il ne restait au CC-FIS qu'à structurer le FIS à l'étranger selon leurs convenances, c'est-à-dire en plaçant les partisans de la djazaâra à la tête de toutes les représentations du parti et attendre que les choses aillent dans le sens d'un retour du parti à la vie politique normale. Mais là, encore, les choses grincent. Pour les leaders du parti dissous, faire pièce à Dhina équivaut à le remettre, lui et toute la mouvance djazaâra, à leur «petite place». Car ils n'oublient pas qu'ils avaient été noyautés puis écartés de la direction du FIS lors du congrès de Batna de 1991 et que la mouvance djazaâra a été le principal élément qui a poussé vers l'affrontement en mai-juin 91. La lutte sourde entre salafiste et djazaâra est allée au point qu'un Hachemi Sahnouni accuse les tenants de la tendance djazaâriste d'avoir fait dériver le FIS vers la violence. Djeddi, lui, ne veut même pas en parler et les assimile à des «inconnus». Guemazi juge qu'ils sont «usurpateurs» et Boukhamkham, tout comme Rabah Kebir et les leaders de l'AIS, estime que le congrès initié à Bruxelles n'a «ni fondement, ni légitimité ni encore moins une quelconque assise politique légale». Ali Benhadj, qui s'est cantonné dans un «silence éloquent», s'est, en quelque sorte, démarqué des «congressistes bruxellois», et s'est inscrit en faux avec l'appui apporté par Abassi Madani à Dhina. Voilà en gros la «soupe FIS» en ébullition et il est très intéressant de suivre l'évolution d'une tendance que les analystes vouent à la disparition totale, mais que les réalistes du terrain persistent à inscrire dans le quotidien.