Très applaudi et surtout flatté, l'enfant originaire de la wilaya de Béjaïa a, sans aucune résistance, abdiqué en répondant favorablement aux voeux de ses admirateurs. «Nous allons mettre de l'ambiance». L'annone a été faite par cheb Abbès qui a clôturé la troisième soirée du Festival de la chanson oranaise dès que ce dernier a terminé l'interprétation, sans faute, de la chanson Wahrane Wahrane rouhti khssara du défunt Ahmed Wahby. Malgré les recommandations des responsables du festival, qui auraient exigé des chanteurs d'interpréter exclusivement la chanson oranaise, le raï triomphe à la moindre occasion propice. Le gala de samedi soir a été édifiant. Un seul cheb a pu révolutionner le festival en replaçant toutes les choses dans leur contexte tout en coupant net l'herbe sous les pieds des détracteurs de la musique au verbe cru. Dans sa première participation à une telle festivité, Cheb Abbès a fait le point. Le raiman a pu et su transformer l'esplanade de la troisième soirée en une véritable arène à travers laquelle le verbe cru a triomphé sous les regards interloqués du staff du festival dont le commissaire en personne. Sous les cris enthousiastes et danses des plus folles, les quelque 3000 spectateurs, venus de partout, le raï a eu son mot à dire. Hommes et femmes, filles et garçons et des familles entières sont, dès la montée du chanteur sur scène, entrés en étroite symbiose avec cheb Abbès. Ce dernier, sans trop tarder, s'est lancé dans la très célèbre chanson sentimentale Semitek Omri (Je t'ai baptisé ma vie). Il ne suffit surtout pas de trop se démener pour plaire vu que le raï est cette musique qui fait vibrer, au plus profond, les âmes de ses fans, en particulier la catégorie juvénile. D'autant que cette même frange de la société a été, à la fois, réconfortante et capricieuse tout en mettant l'artiste à l'aise sans pression. Pour sa part, le chanteur, n'a pas hésité à répondre aux demandes insistantes de ses fans le suppliant de rechanter, une deuxième fois, le succès de tous les temps. Très applaudi et profusément flatté, l'enfant, originaire de Béjaïa a, sans aucune résistance et aussitôt, abdiqué en répondant favorablement aux exigences de ses admirateurs. Le public, qui s'est déchaîné, s'est enflammé dans une grande complicité interactive accompagnant en choeur le chanteur. Celui-ci, qui n'a pas limité son show à deux chansons, a récidivé de plus belle berçant ses fans aux rythmes d'un autre succès qui revient dans toutes les bouches des jeunes Oranais, Nediha pour de bon (Je la prends pour de bon). Avant de poser le micro, l'assistance a eu droit à une chanson mélancolique retraçant l'échec de la vie amoureuse. La chanson est intitulée Kathrou Hmoumi, (Ma misère s'est amplifiée). Là encore, le public, notamment les jeunes, garçons et filles, n'ont pas hésité à se mettre en harmonie entière avec l'ambassadeur de leurs rêves et de leurs désillusions. Le Théâtre de verdure d'Oran n'a pas connu une telle frénésie depuis pratiquement plusieurs années en particulier depuis que la musique raï et son festival annuel ont été chassés d'Oran. Ouvrant le bal de la troisième soirée, Houari Bachir est revenu loin dans l'histoire de la chanson oranaise en déterrant et interprétant El Hmam de Blaoui El Houari. Lui emboîtant le pas, Houari Assil, a puisé son texte dans le répertoire du défunt Cheikh Fethi et celui de Blaoui El Houari. Idem pour la chanteuse Souad qui a recouru au terroir du défunt Cheikh Fethi. La musique oranaise semble appartenir exclusivement à trois chanteurs en l'occurrence Blaoui El Houari et les défunts Cheikh Fethi et Ahmed Wahby. Ce sont ces hommes qui ont balisé ce genre musical très répandu dans l'Oranie des années 1950, 1960 et 1970 tandis que les chanteurs actuels ont sombré dans le suivisme et le plagiat sans songer, un jour, à la création et à l'innovation. Les mêmes chanteurs qui se sont relayés sur la scène des trois éditions, ne faisaient que reprendre les chansons de cheikh Fethi, Ahmed Wahby et Blaoui El Houari. Pourtant, le Festival de la chanson oranaise est, selon ses responsables, institutionnalisé pour donner une nouvelle dynamique à cette musique en décrépitude. Les spécialistes ont été unanimes à relever beaucoup d'imperfections chez les interprètes de la chanson oranaise et plusieurs atouts chez les raimans. Nombre de ces prêcheurs du verbe pudique se trouvent dans l'incapacité d'interpréter la musique raï alors que les raimans ont, à plusieurs reprises, démontré leur talent en se mettant aisément dans le style jalonné par Ahmed Wahby, Cheikh Fethi et Blaoui El Houari. Là est toute la question qui ne trouve pas de réponse.