A quelques jours du début du mois sacré, les spéculateurs guettent la moindre brèche dans la stratégie établie par l'état pour cette période bien particulière. Les pouvoirs publics pensent avoir ficelé une stratégie pour un Ramadhan calme et surtout pas cher. Le test commencera dans quelques jours. Malgré les importations de certains produits à forte demande et les promesses de contrôle des prix, il n'est pas sûr que le scénario prévu par le gouvernement fonctionne sans accroc. Pourtant, il compte bien sur cette occasion pour renforcer sa crédibilité. Il s'est adonné depuis plusieurs semaines à un matraquage médiatique pour expliquer aux consommateurs qu'il n'a ménagé aucun effort afin que leur plat soit bien garni et à moindres frais. Viande stockée, citron importé, contrôleurs des prix affectés. Rien ou presque n'est laissé au hasard. Même les salaires des travailleurs ont été relevés en chaîne depuis le début de l'année. Après tous ces aménagements, le gouvernement, en entier, pense être parti en congé avec le sentiment du devoir accompli. Deux ministres ont été particulièrement mobilisés pour monter au «front» de la persuasion après avoir fait des promesses. L'un d'entre eux, Mustapha Benbada, fait ses premières armes depuis quelques semaines seulement au ministère du Commerce et il a déjà réuni les fournisseurs du marché pour leur faire la leçon et les inciter à se doter d'un comportement moral en approvisionnant correctement le marché en produits agroalimentaires et en les cédant à des prix raisonnables. De son côté, le ministre de l'Agriculture, Rachid Benaïssa, a surtout planché sur la question de la disponibilité de ces mêmes produits. Mais est-ce suffisant pour freiner l'appétit des spéculateurs? Ces derniers n'ont pas qu'une seule corde à leur arc. Ils ne vont pas hésiter à attaquer les maillons les plus faibles de la chaîne. Ils exploiteront toutes les failles du système du duo ministériel pour mettre à profit, même de manière excessive, les opportunités offertes lors de ce mois. Ily a d'abord le flanc de la disponibilité des produits à cause de l'importation. Ce qui est perçu comme un atout par le gouvernement peut se révéler, en fin de compte, un handicap. De nombreux produits essentiels entrant dans la composition du couffin des ménagères sont importés. Viandes, mais aussi citron, sucre et huile. Il est difficile dans ces conditions de maîtriser l'offre et les prix. Le circuit de distribution ne mettra pas beaucoup de temps à exploiter cette faille à son profit en stockant massivement et en jouant à volonté sur les prix. Généralement, la première semaine de Ramadhan est infernale sur le plan des prix. C'est la même chose pour la dernière semaine qui coïncide avec l'approche de l'Aïd-el-Fitr. L'existence de monopoles pour certains produits comme l'huile et le sucre est même soupçonnée par le ministre du Commerce qui promet de créer des mécanismes de régulation qui font défaut à l'heure actuelle. Il y a un sous-effectif en ce qui concerne les agents de contrôle. Ils sont à 4500 pour contrôler 1, 2 million de commerçants. Sans omettre le fait que le marché parallèle participe à l'érosion du pouvoir d'achat. En tout cas, même dans le secteur formel, les prix sont libres. Aucune loi ne les limite. Les contrôleurs agissent sur l'obligation d'affichage des prix. Ils peuvent aussi inspecter les mesures d'hygiène. Or, le problème n'est pas là. C''est celui de la disponibilité qui est posé. A côté de celui des prix. Devant cette dernière donne, le citoyen est seul. La spéculation peut le broyer sans qu'il n'offre aucune résistance. Il n'y a même pas d'associations de consommateurs capables de défendre ses intérêts. Circonstance aggravante: il est atteint de la «fièvre acheteuse» à chaque Ramadhan. La faiblesse de son pouvoir d'achat est déjà perceptible lors des 11 mois de l'année. Pendant le Ramadhan, l'évidence devient plus criante. Comble de catastrophe, cette année, il risque de ne même plus trouver assez de marchandises à acheter. En effet, les boulangers ont choisi cette période pour fermer boutique. Du moins certains d'entre eux. Le pain de 8,50 DA. Ils l'achèteront à 10 DA. Dans des conditions d'hygiène déplorables. Cher et malsain. Voilà les souvenirs qui resteront du Ramadhan 2010.