Coïncidant cette année avec les vacances d'été, le mois de Ramadhan, qui commence dans une dizaine de jours, a contraint hôtels, stations balnéaires et autres agences de voyages de s'organiser pour tenter de minimiser les manques à gagner pouvant naître d'une saison touristique exceptionnellement courte. L'approche du mois de jeûne a réduit la période des réjouissances estivales à un mois et demi (1er juillet-15 août), la tradition voulant que le Ramadhan se passe entièrement dans le cocon familial. Les entreprises de tourisme ont eu, du coup, à gérer un surcroît d'estivants et de visiteurs (50 000 par jour en moyenne pour certains), pressés d'en finir avec les vacances d'été pour mieux se préparer aux exigences du mois sacré. C'est cette forte concentration de vacanciers sur une période relativement courte qui a poussé les gérants des lieux touristiques et autres organisateurs de la saison estivale à revoir leurs plannings pour tenter de s'adapter — non sans peine, selon leurs propres aveux — à la nouvelle donne. De nombreux vacanciers, interrogés par l'APS dans des établissements hôteliers, ont préféré, disent-ils, réduire la durée de leurs vacances pour ne pas avoir à subir les désagréments d'une surcharge des centres de vacances, que ce soit les hôtels, les restaurants ou les sites de divertissement. “D'habitude, nous séjournons plus longtemps dans ce bel endroit (Sidi Fredj) mais, cette année, nous sommes contraints de rentrer chez nous plus tôt en raison de l'encombrement des lieux dû sans doute à l'approche du mois de Ramadhan”, dit Salim, un fonctionnaire de 50 ans, père de quatre enfants. Réduction des tarifs et soirées spéciales Il va sans dire que dans les prochains jours, le taux de fréquentation sera proche de zéro, selon les gérants du complexe touristique de Sidi Fredj, qui se préparent à concocter un programme “Spécial Ramadhan” à même de combler un peu les éventuelles pertes de recettes engendrées par cette situation. El Manar et El Marsa, les deux grands hôtels relevant de l'entreprise de gestion touristique de Sidi Fredj ont d'ores et déjà pris les devants en proposant des réductions sur le tarif d'hébergement au cours du mois de Ramadhan pouvant aller jusqu'à 70%. Le directeur de l'hôtel El Manar, Ahmed Ben Madour, confirme cette “stratégie” de réduction drastique des prix, pour attirer d'éventuels estivants, d'autant plus que le climat et les conditions de séjour semblent s'y prêter à merveille. Il s'agit aussi, aux yeux de M. Ben Madour, de pousser certaines familles à “casser la routine habituelle”, qui s'installe pendant le mois sacré, et à venir tirer profit, ne serait-ce que pour quelques jours, des bienfaits de l'été au bord de la mer, tout en accomplissant leur devoir religieux sur place et dans un cadre différent. Par cette idée, ce dirigeant dit viser en particulier la communauté algérienne émigrée qui pourrait trouver dans la stratégie de l'entreprise un moyen pas cher de se détendre et se ressourcer. Pour sa part, le directeur de l'hôtel El Marsa, Youcef Chérifi, a fait remarquer que le mois de Ramadhan n'empêchera pas les établissements touristiques de poursuivre leurs activités artistiques et de loisirs et de renflouer ainsi leurs caisses pour compenser, même partiellement, la baisse attendue des taux d'hébergement dans les hôtels. Une expérience nouvelle pour les agences de voyages Différents opérateurs et agences de voyages des secteurs public et privé, vivent, eux aussi, cette coïncidence du mois de Ramadhan avec la trêve estivale comme une nouvelle expérience à gérer comme il se doit, afin de pallier ses éventuelles conséquences sur leurs activités et donc sur leur équilibre financier, d'autant que la bonne synchronisation entre les deux évènements n'avait pas eu lieu, dit-on, lorsqu'elle s'était déjà imposée, il y a trente ans. L'Office national algérien de tourisme (Onat), à titre d'exemple, est en train d'étudier la possibilité d'attirer la clientèle pour les veillées du mois sacré, par le recours à des bus spéciaux pour le transport des familles depuis quatre ou cinq points de la capitale vers certaines destinations, telles que le complexe de Zéralda. Révisant la baisse des prix de ses prestations, l'Office se montre toutefois peu optimiste, car à peu près convaincu que quoi qu'on fasse les Algériens, dans leur majorité, préfèrent passer les soirées du Ramadhan chez eux, entourés des proches, des voisins ou des amis, admet un de ses cadres. De leur côté, les agences de voyage ont enregistré, en juillet et jusqu'à la mi-août, une demande en nette hausse par rapport à la même période des années précédentes, mais aucune réservation, ou presque, pour le mois de Ramadhan. Selon la Fédération nationale des associations des agences de tourisme et de voyages, “au moins, 80% des Algériens ont préféré passer cette année les vacances d'été en Algérie”, ce qui a fait chuter la demande sur les destinations internationales. Et là aussi, le Ramadhan y serait pour quelque chose. La même source considère cependant que le tourisme religieux s'annonce prometteur durant le Ramadhan, beaucoup de fidèles étant en congé professionnel et donc plus enclins à effectuer une Omra. Quoi qu'il en soit, les agences de voyages avouent réfléchir déjà à la meilleure manière de gérer le tourisme pendant le Ramadhan, pour les quatre ou cinq années à venir, avant que le mois sacré quitte peu à peu l'été pour offrir aux jeûneurs les plus belles soirées printanières. APS