A partir du 1er octobre, la cour d'assises spéciales de Paris jugera les auteurs des attentats de 1995 qui ont fait 8 morts et 200 blessés. Trois des six attentats revendiqués par le GIA en 1995 seront, de nouveau, devant la Cour d'assises spéciales de Paris. Ce procès, qui va s'étendre sur pratiquement tout le mois, débutera à partir du 1er octobre. L'intérêt et l'émotion que suscitera le procès des poseurs de bombes, communément appelé «l'af-faire du RER», seront cependant, atténués par l'absence des éléments-clefs: Khaled Kelkal, abattu par la gendarmerie à la périphérie lyonnaise, Ali Touchent, abattu par les services de sécurité algériens, à la rue de Tanger et surtout, Rachid Ramda, détenu depuis sept ans par les autorités judiciaires londoniennes. Les deux inculpés qui se présenteront à la barre seront Boualem Bensaïd et Smaïl Aït Ali Belkacem, qui devront répondre devant la Cour d'assises spéciales - qui ne siège que pour les affaires liés au terrorisme - de leurs responsabilités respectives dans les explosions de l'été 1995 et qui avaient plongé la capitale dans une psychose qui aura duré de juillet à octobre de la même année. Boualem Bensaïd, 34 ans, comparaîtra comme auteur principal présumé des attentats dans Paris, à la station Saint-Michel (25 juillet, 8 morts et 150 blessés) et à la station Maison-Blanche (6 octobre, 18 blessés) et comme complice présumé de l'attentat de la station Musée d'Orsay (17 octobre, 30 blessés). Quant à Smaïn Aït Ali Belkacem, 34 ans lui aussi, il répondra du dépôt de la bombe à la station Musée d'Orsay. Les deux hommes, de nationalité algérienne et appartenant au GIA, avaient été condamnés à dix ans d'emprisonnement, en 1999, mais au vu du dossier volumineux qui leur est, cette fois, consacré, encourent la peine maximale prévue en pareil cas, c'est-à-dire la prison à perpétuité. Le grand absent de ce procès sera Rachid Ramda. La chaise vide qui lui sera symboliquement réservée, près de celles de Bensaïd et Aït Ali, témoigne sur le dépit des juges français face à l'absence de celui qu'ils considèrent comme un élément-clef du réseau de poseurs de bombes du GIA en France. Détenu à Londres et accusé d'avoir financé les attentats à Paris, en 1995, Rachid Ramda a complètement empoisonné la coopération judiciaire entre Paris et Londres depuis sept ans, et sonne comme un synonyme d'échec de la diplomatie judiciaire française dans ses tentatives à infléchir les autorités policières anglaises à lui livrer l'accusé. En juin dernier, les magistrats de la Haute cour britannique, avaient cassé la décision du ministre de l'Intérieur, David Blunkett, d'extrader Rachid Ramda, les juges britanniques avaient relevé que les griefs retenus contre Rachid Ramda avaient été arrachés par la violence et ne pouvaient, par conséquent, constituer des chefs d'inculpation crédibles. La Haute cour a conclu qu' «en tant qu'Algérien suspecté de terrorisme, (Ramda) est confronté à un risque de traitement inhumain ou dégradant en France suffisamment réel pour rendre inacceptable la demande de l'extrader». Elle reproche, surtout, à Paris d'avoir sciemment caché ces violences présumées. Les attentats parisiens de l'été 1995, dont les auteurs présumés vont être jugés à partir du 1er octobre à Paris, marquaient la volonté du Groupe islamique armé (GIA) d'internationaliser la crise algérienne en frappant la France dans sa capitale. Cette vague d'attentats, qui a fait 8 morts et 200 blessés, faisait suite à une série d'actions visant des Français en Algérie déchirée par les attentats et les tueries des groupes armés islamistes depuis 1992. Le GIA comptait ainsi mettre l'Algérie en mauvaise posture et jeter le trouble sur les relations entre Alger et Paris. Le GIA reprochait à la France de cautionner le pouvoir algérien dans sa lutte contre les maquis islamistes. La position, française à l'égard de l'islamisme intégriste s'était, en effet, durcie après l'arrivée au pouvoir de la droite, au printemps 1993, et l'élection du président Jacques Chirac, deux ans plus tard. Il est très probable que les débats sur l'implication de certains membres du GIA vont verser dans des commentaires du genre: «Pourquoi Ali Touchent, personnage-clé des attentats, a-t-il échappé à toutes les rafles avant de se faire tuer à Alger? Quel a été le rôle des services spéciaux dans la lenteur constatée dans l'enquête? Quel est le degré de la manipulation dans ce dossier? etc.» Voilà donc, ouvert, le livre d'histoire émaillé par les intrigues des services spéciaux et dont, à jamais, nous ne connaîtront que la face visible et «politiquement correct».