Nicolas Sarkozy était au courant de l'hésitation du ministre des Affaires étrangères à démissionner. Le ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, a confié qu'il avait pensé à la démission face à la polémique sur les expulsions de Roms vers la Roumanie et la Bulgarie, mais qu'il avait estimé que «s'en aller, c'est déserter». Soulignant la condition très spécifique et difficile que vivent les Roms et affirmant avoir «le coeur serré» par cette affaire, le ministre a déclaré à la radio RTL: «Comment faire pour y remédier? En démissionnant, j'y ai pensé.» Ce qui l'a retenu de le faire, a-t-il confié, «c'est l'efficacité: il faut absolument s'en occuper beaucoup plus». «C'est important de continuer. S'en aller c'est déserter, c'est accepter», a-t-il dit. «Je ne suis pas content de ce qui s'est passé, les Roms je m'en occupe depuis 25 ans. Je ne suis pas content de cette polémique, de cette espèce de mayonnaise verbale», a-t-il observé. Ancien French Doctor à Médecins sans frontières et Médecins du Monde, figure de l'action humanitaire depuis des décennies, Bernard Kouchner est le symbole de l'ouverture vers la gauche du gouvernement français, qu'avait voulue Nicolas Sarkozy au début de son mandat en 2007. Ministre de plusieurs gouvernements socialistes, il avait alors accepté de rejoindre Nicolas Sarkozy. Interrogé sur le point de savoir s'il avait évoqué son hésitation à démissionner du gouvernement avec Nicolas Sarkozy, Bernard Kouchner a répondu: «Si on ne parle pas avec le président, on en parle avec qui?» Le gouvernement français a été vivement mis en cause pour sa politique de démantèlement des campements de Roms illégaux et les expulsions de centaines d'entre eux en situation irrégulière vers la Roumanie. «Non seulement Bernard Kouchner n'a pas démissionné, mais il a fait devant les ambassadeurs un discours, vendredi dernier, dans lequel il a défendu la politique du gouvernement et en particulier, il s'en est pris à tous ceux qui ont utilisé des paroles insupportables, comparant les retours volontaires de Roms aux déportations par les nazis», a réagi le Premier ministre François Fillon, quelques minutes plus tard sur la radio publique France Inter. Après plusieurs faits divers médiatiques, le président français avait annoncé fin juillet un renforcement des mesures sécuritaires, ciblant en particulier les Roms et certains criminels d'origine étrangère, qui pourraient être déchus de leur nationalité française. Plus de 8300 Roms roumains et bulgares ont été expulsés depuis le 1er janvier, selon le ministre de l'Immigration Eric Besson, qui a promis d'accélérer la cadence. Les récents sondages ont mis du baume au coeur des socialistes, qui ont perdu trois élections présidentielles d'affilée: Nicolas Sarkozy serait écrasé au second tour de la présidentielle par Dominique Strauss-Kahn (59% contre 41%) mais également nettement battu par Martine Aubry (53-47). Et 55% des Français souhaitent que la gauche remporte la prochaine présidentielle. Mais ce souhait n'exclut pas un profond scepticisme: 57% pensent que la gauche ne ferait pas mieux que la droite si elle était au pouvoir.