un gars qui réussit, qui offre des stations de dessalement d'eau, qui crée des emplois et qui fait la démonstration qu'on peut être Algérien et réussir..., je l'applaudis des deux mains. Le journal Le Parisien lui a consacré sa une et deux pleines pages intérieures et la question qui germe en majuscule dans ma tête, c'est: «Pourquoi!» Le titre, lui-même, «L'incroyable Monsieur Khalifa» est ambigu, la photo choisie avec ce journal arabophone, zoomée par préméditation, m'interpelle...de même que cette précision...«de plus en plus présent en France». On ne s'inquiète pas que les Japonais squattent l'industrie française, que les Anglais s'approprient les vignobles de Bordeaux, que les Américains colonisent la Côte-d'Azur...non...cela est dans l'ordre des choses. Mais qu'un Khalifa (après tout et au-delà de sa fortune, ça demeure un bicot), qu'un Khalifa, un fils d'ancien colonisé, lecteur en arabe s'impose dans le paysage du show et du business français, cela semble faire désordre. Et en exergue, je cite : «Il est étroitement surveillé par le pouvoir algérien», et le pompon «les services de renseignements français s'intéressent de près aux fonds du golden boy». Quand on passe commande de 18 Airbus pour 1,6 milliard d'euros, messieurs les journalistes français, vous savez bien qu'au nom de la raison d'Etat vos fins limiers seraient priés par les plus hautes autorités de fermer leur gueule et de mettre un chiffon sur leurs yeux. Alors que Khalifa soit riche, c'est incontestable, que sa fortune soit mal acquise, cela reste à prouver, qu'il soit le banquier des généraux, j'en ris, car les banques françaises et suisses ne lui auraient laissé que des miettes, qu'il sponsorise l'OM, qu'il bouffe à la Tour d'Argent, c'est son affaire à moins que certains lieux de la République soient comme jadis interdits aux chiens et aux Arabes. Honnêtement, Rafik Khalifa, je n'en ai rien à cirer et sa fortune m'indiffère comme celle de Bill Gates me laisse de marbre, mais il se trouve que c'est un Algérien et je sens la meute à ses trousses parce que c'est un Algérien qui réussit. Alors je vais dire: «Allah izid lou» si ses biens sont bien acquis et «Allah ina'alou», si c'est le produit de crimes et de vols aux dépens de son peuple. Sinon, un gars qui réussit, qui offre des stations de dessalement d'eau, qui crée des emplois et qui fait la démonstration qu'on peut être Algérien et réussir...je l'applaudis des deux mains. Après tout, il aurait pu mettre sans risques ses milliards dans vos banques et vivre comme un prince saoudien dans le faste des mille et une nuits. C'est comme ça que les Occidentaux aiment les Arabes et surtout, pour eux, c'est comme ça que devrait être un Arabe : jouisseur et fainéant! J'en remets une couche sur l'affaire Khalifa avec cette interrogation dans Le Parisien «mais qui est donc Rafik Khalifa, ce jeune homme d'affaires algérien de 35 ans?». Double précision «jeune» et «35 ans», sous-entendu : il n'aurait pas eu le temps d'arriver à ça. Pourquoi n'a-t-on pas fait le procès en «jeunisme» quand Fabius est devenu Premier ministre de la France à 31 ans, et quand Jean-Marie Messier est devenu le number one de la finance à 28 ans? Ah, j'oubliais, eux, sont Français, et c'est un Français, Corneille qui disait dans Le Cid: «Aux âmes bien nées la valeur n'attend point le nombre des années.» On s'extasie sur le destin de Bill Gates devenu à 24 ans l'homme le plus riche du monde et on s'interroge à la limite de la suspicion sur un Algérien qui devrait tenir une épicerie à Barbès, au lieu de cela, il achète des Airbus à la France. Basta de Khalifa ! Je voulais simplement inviter la conscience française à se faire à l'idée que les enfants de colonisés sont libres et ils font, au quotidien et dans tous les domaines, la preuve de leur savoir et de leur savoir-faire. Vous ne vous excitez pas qu'un Berlusconi ait des relents de cosa nostra, car il est Italien, chrétien, Européen. Mais que demain Kaddour rachète Canal+ et ce sera, j'en suis sûr, la levée de boucliers. Vous avez été, vous êtes et vous serez racistes et je pèse mes mots. Alors je vais vous dire une bonne chose au micro d'une radio dont le nom «Beur» ne prête à aucune équivoque, nous avons l'intention de porter notre amazighité et notre arabité, de même que notre appartenance matricielle à l'ensemble du Maghreb au sommet de la réussite dans tous les domaines. L'épisode Khalifa n'est rien sinon significatif, ce qui adviendra sera une présence remarquée des Mohamed, non seulement sous le maillot 10 de l'équipe de France, mais partout où un citoyen de cette République peut, par sa valeur et son savoir-faire, s'imposer. Vous êtes tenus d'ouvrir toutes les portes y compris pourquoi pas, un jour, celles de l'Elysée.