la kabylie s'apprête à vivre encore une journée des plus redoutées. Jamais, depuis l'Indépendance du pays, les élections de proximité ne se sont présentées avec autant d'ambiguïté et dans un climat de tension aussi pesant que celles prévues pour jeudi prochain et ce, particulièrement en Kabylie. Aussi bien chez les partisans de la tenue du scrutin que chez ceux qui le boycottent ou le rejettent, cette semaine constitue le dernier virage à négocier pour atteindre les objectifs qu'ils se sont assignés. Depuis le début de la campagne électorale officielle aucune note, vraiment aucune, prêchant la sagesse et le pacifisme, n'est venue pour rendre espoir à une population désabusée et lasse de ces interminables déchirements entre frères et de cette violence qui l'accompagne au quotidien. La région de Kabylie s'apprête à vivre encore une journée des plus redoutées, à l'occasion des marches et autres grèves générales qui rythmeront la vie des principaux chefs-lieux de wilaya. Ces manifestations arrêtées par les différentes structures de l'interwilayas, lors des derniers conclaves tenus le week-end passé, se veulent une énième démonstration de force, destinée à faire pression sur le pouvoir en vue de la satisfaction des revendications citoyennes posées, depuis plus de 18 mois et ce, pour commémorer les événements du 5 Octobre 88 qui ont donné naissance au multipartisme. Ces marches se dérouleront sous les mots d'ordre consistant à exiger «la satisfaction de la plate-forme d'El Kseur, le rejet des élections de la honte du 10 octobre, la libération des détenus du mouvement et l'arrêt des poursuites judiciaires». Prévues de manière synchronisée à 11 heures à Tizi Ouzou, Béjaïa, Boumerdès et Bouira, ces démonstrations de rue constituent aussi, le couronnement des centaines de meetings et conférences initiés dans le cadre de la campagne anti-vote, menée, tambour battant, depuis l'entérinement du principe du rejet du prochain scrutin de proximité. Le ton a été donné jeudi, dans la ville d'El-Kseur par le comité local qui a organisé une marche à l'issue de laquelle, son président, M.Ali Gherbi, s'est longuement adressé aux participants. L'orateur a évité soigneusement de prononcer le mot «empêchement» se contentant d'appeler les citoyens «à appliquer scrupuleusement les décisions de l'interwilayas retenues dans ce cadre». Outre la satisfaction des revendications du mouvement et le rejet du prochain scrutin, l'orateur a exigé «la libération des détenus arrêtés lors du saccage du siège du FFS» dans cette ville. Au sein de l'opinion locale, l'interrogation et le doute sont plus que jamais de mise sur ce que réserveront les autorités aux actions du jour. Seront-elles «empêchées» comme c'est de coutume depuis quelques mois? Où est-ce que les autorités observeront une attitude de «tolérance» pour apaiser un peu la tension? Dans un cas comme dans l'autre, la situation ne prête guère à l'optimisme, eu égard à la détermination qui anime les deux camps. En tout cas, le simple citoyen ne se fait plus d'illusions, quant aux affrontements qui peuvent survenir dans les deux cas de figure. Les renforts dépêchés à travers les différentes localités de la région ne dénotent pas seulement l'intention des pouvoirs publics d'aller vers une étape plus ferme pour mieux «sécuriser le scrutin», mais ils sont également perçus comme une réponse immédiate aux actions de terrain d'aujourd'hui. Ce redéploiement, habituellement discret, est venu plus tôt que prévu et a, d'ores et déjà, donné lieu à quelques réactions d'hostilité dans certaines localités de Béjaïa. Bref, de l'avis général une nouvelle recrudescence de la violence n'est pas à écarter. Intervenant à cinq jours de la tenue du scrutin, la journée d'aujourd'hui, constitue un véritable indice sur les circonstances du déroulement des élections locales.