Alors que son club de toujours croule, selon lui, sous les dettes et traverse une situation des plus alarmantes, au moment où l'Algérie vient juste de rentrer dans le professionnalisme en football, et que l'Equipe nationale vient d'essuyer une défaite amère face à la République centrafricaine, l'ex-président du MC Alger, avec ses trois trophées en 1976 dont la Coupe d'Afrique des clubs avec le Mouloudia), M.Abdelkader Drif, a bien voulu se livrer aux questions de L'Expression où, il évoque ces trois grands sujets. L'Expression: Tout d'abord, quel commentaire faites-vous sur la défaite de l'Equipe nationale contre la République centrafricaine pour le compte des éliminatoires de la CAN 2012? Abdelkader Drif: Comme tout Algérien amoureux de l'Equipe nationale, ma déception fut profonde. Benchikha, que j'ai connu jeune au MC Alger, a un caractère trempé. Personnellement, je pense qu'il pourrait redresser la barre sous, bien entendu, certaines conditions. A quoi, selon vous, est due cette défaite? Nous avons remarqué le comportement de nos joueurs et ils ne nous ont pas du tout convaincus en nous laissant sur notre faim. Alors, est-ce un manque de concentration ou une insuffisance de préparation d'abord dans leurs clubs respectifs, et ensuite, lors du dernier regroupement des Verts avant le départ vers Bangui? Ou est-ce encore, la suite du feuilleton de Rabah Saâdane qu'il faut d'ailleurs saluer à travers vos colonnes, de ma part? Ce sont là toutes les questions auxquelles il faut avoir des réponses pour répondre plus objectivement à la question. Et si je peux me hasarder dans un conseil pour Abdelhak Benchikha, je lui proposerai d'accepter d'être aidé par une grosse pointure expérimentée et peu importe si celle-ci soit algérienne ou étrangère. Parce qu'en fait, il est un peu frêle pour le costume qu'on lui a passé. J'insiste sur le côté conseil et pas immixtion dans ses affaires. Attendons donc les 4 prochains matchs pour livrer un diagnostic très objectif. Et que vous inspire le comportement des joueurs algériens dans ce match contre la Centrafrique? A mon avis, depuis le match du Soudan jusqu'à aujourd'hui, il ne faut pas tout de suite réagir subjectivement. C'est-à-dire laisser parler l'émotion due à la déception. On ne peut pas brûler aujourd'hui ce que l'on a adoré hier. Mais, force est de constater que depuis le Mondial sud-africain, l'atmosphère qui semblait se dégager n'appellerait pas à l'optimisme. Le match de Bangui n'est donc, à mon sens, que le résultat de tout ce parcours. Alors se pose la question, peut-on nous appuyer uniquement sur l'émigration en matière de sélection nationale de football? Laquelle serait donc votre réponse? Point fondamental pour beaucoup d'entre les joueurs du cru locaux, ils n'ont pas de vécu de la haute compétition européenne, mais il n'en demeure pas moins qu'ils ont dans les jambes une expérience algérienne. Il faut donc arrêter cette dichotomie. Parce qu'il n'y a aucune honte à le dire, hormis quelques joueurs dont Bougherra, Ziani et quelques autres, la majorité des joueurs algériens évoluant à l'étranger jouent dans des clubs tout juste moyens si ce n'est dans des championnats tout autant moyens. Il faudrait donc trouver un équilibre qui tient compte de ces paramètres et aller de l'avant pour rebâtir la maison du football algérien qui est l'Equipe nationale. Etes-vous optimiste quant aux chances de notre Equipe nationale pour se qualifier à la phase finale de cette CAN 2012? Je suis de nature optimiste et je suis surtout confiant dans les capacités d'orgueil des jeunes Algériens. Il ne faut pas oublier qu'en 1954, ce sont des jeunes Algériens qui ont relevé le grand défi de la libération. Mais, le prochain match face au Maroc serait déterminant, qu'en pensez-vous? L'ogre marocain qu'on nous présente n'a pas fait mieux chez lui contre ces mêmes Centrafricains, et je n'oublie pas encore ce carton de 5-0 que nous avons infligé aux Lions de l'Atlas à Casablanca. Il faut donc arrêter de considérer l'équipe marocaine comme un écueil plus que semblable à l'écueil égyptien. Et que pensez-vous du professionnalisme en Algérie et de ses débuts? Il est de bonne règle, pour éviter une erreur d'analyse, de laisser cette première saison qui constitue la première année du professionnalisme en Algérie pour faire une analyse exhaustive et juste de ce qui a été entrepris. Ceci d'une part, et d'autre part, cela ne nous empêche pas de faire quelques spéculations comme par exemple celle qui touche au problème des infrastructures. Peut-on parler de professionnalisme sans cet outil de travail indispensable à sa disposition?Par ailleurs, s'appuyer sur une ossature fonctionnelle de 32 clubs me parait un pari difficile à tenir. Pourquoi pensez-vous que c'est un pari difficile? Tout simplement par comparaison avec les pays les plus avancés que nous, cela n'a pas été le cas. Puisque tous les pays et européens en particulier, se sont appuyés sur un socle de 5 à 6 clubs sur lesquels ils ont misé. Et ensuite, on ramène 1 ou 2 clubs pour les joindre à la nouvelle famille constituée. Cela est donc raisonnable. Mais il y a surtout l'effet de l'argent qui constitue le nerf de la guerre de toute opération liée au professionnalisme? Ecoutez, cher ami, ce n'est pas en injectant quelques milliards par-ci et par-là qu'on peut engendrer une politique de professionnalisation. L'impact de la vie économique sur ce concept est important. Or, notre économie est à peine entrée par la porte du libéralisme... Il y a aussi ce problème de mentalité qu'il faudrait changer nécessairement, ne le pensez-vous pas? Le professionnalisme dans le football c'est d'abord une culture. C'est comme la démocratie. Je pense que la mentalité de nos dirigeants n'est pas, pour le moment, accessible à cette culture. Et si on parlait maintenant du MC Alger et de ses problèmes, qu'avez-vous à nous dire? Avec mes amis journalistes, je ne peux jamais échapper à des questions sur le Mouloudia d'Alger. Je viens de terminer une grande tournée avec les différentes personnes qui se sont approprié le sigle de ce grand club. Je peux vous affirmer que je n'ai rencontré que MM.Mohamed Djouad et Hakim Boukadoum, président du comité des supporters, capables de discuter et disserter sur l'histoire de ce grand club. Mon seul regret est de n'avoir pas pu convaincre mon ami Rachid Marif au partage avec moi de l'approche profonde de l'histoire avec un grand «H» qui fut celle de nos glorieux hommes qui ont animé, au cours de leur vie la philosophie avant-gardiste de ce grand club. Je cite par exemple, Mohamed Bouras, le fondateur des Scouts Musulmans Algériens et de l'Emir Khaled avant lui. Eux qui ont été les symboles vivants du nationalisme algérien pour le Mouloudia d'Alger. Lorsqu'on regarde avec un oeil critique ce qui se fait en 2010 avec ce prestigieux et historique club sans que l'autorité politique et la puissance administrative n'interviennent, je suis très déçu. Quand je vois l'Espérance de Tunis, le WA Casablanca au Maroc et le Ahly du Caire qui sont les symboles de la Lutte nationale de leur pays, tandis que notre équipe est tombée aussi bas, je laisse alors à votre lectorat de faire l'appréciation de ce que je dis. Concrètement, qu'avez-vous fait pour régler les problèmes du MCA actuel? Sur ma mission entreprise récemment, j'ai eu une entrevue avec le président de la Fédération algérienne de football qui, je dois le dire, à ma profonde satisfaction, m'a laissé entendre et comprendre surtout toute son inquiétude sur l'avenir de ce club. Les supporters de ce prestigieux club doivent bien savoir que l'approche des dirigeants actuels de l'équipe est tout à fait nulle. Je ne vise aucune personne en particulier, mais je constate documents à l'appui et de visu l'ardoise des dettes sur uniquement l'année 2009-2010 et le début de la saison 2010-2011, je dirais que cela coupe les jambes avec ce chiffre de 16 milliers de centimes. Mais on dit que ce sont des dettes contractées depuis 2001? (Il sort un document et nous le fait lire, Ndlr). C'est un document qui a été envoyé avec le dossier du professionnalisme du MCA. Et il ressort comme vous voyez bien: Emprunts 2009-2010: 19.458.407. Prestations des joueurs: 1958.500,00. Prestations staffs technique et médical: 7795.101,52. Prestations staff administratif: 2194.420,00. Primes de signatures: 19.691.308,00. Total: 124.147.037,84. Dettes antérieures 2008-2009: 40.078.937,00 et d'où le total général des dettes après déduction: 16 milliards de centimes. Et ce n'est pas de la création, c'est un document officiel. Et comment donc voulez-vous qu'un investisseur puisse s'engager avec un club tel le MCA actuel? J'étais gestionnaire de plusieurs sociétés de très grand standing dont Mercedes, Volkswagen, Salsinger etc., et je peux vous assurer que quand une société croule sous le poids des dettes telles que celles du MCA, je dirais que ceux qui ont la charge de diriger ce club doivent avoir la pudeur et le courage de se retirer en attendant que la justice ne puisse s'emparer de ce dossier. En conclusion, je lance un appel à tous les Mouloudéens aimant leur club, de s'organiser pour défendre son honneur et son histoire. Quel est l'avenir du MCA selon vous? Les grands clubs, selon la tradition millénaire, ne meurent jamais à condition que les hommes de bonne volonté et aimant bien le club se dévouent et n'abdiquent pas pour redorer le blason de ce club. Il existe une équipe qui joue pour le Mouloudia et non avec le Mouloudia club structuré et ambitieux. C'est-à-dire, que Omar Ghrib est devenu par la force des choses, le Mentor de cette équipe qu'il considère comme la sienne est-ce sérieux?...