Un peu plus d'un tiers des 12.300 stations françaises étaient encore à court de carburant. La situation pourrait encore se dégrader demain, selon l'Union française des industries pétrolières. La bataille contre la réforme des retraites en France, qui devrait être adoptée définitivement mercredi, entre dans sa dernière ligne droite avec une semaine ponctuée par de nouvelles manifestations, la poursuite des grèves et des pénuries de carburant. Au plus bas dans les sondages, le président Nicolas Sarkozy est confronté à la plus grave crise depuis son élection en 2007. Il compte sur les vacances de la Toussaint, commencées vendredi soir, pour affaiblir la mobilisation, avant de remanier son gouvernement. De leur côté, les syndicats vont lancer toutes leurs forces dans le dernier bras de fer avant la promulgation de la loi, sans doute mi-novembre, en maintenant la pression dans le secteur de l'énergie et en organisant plusieurs journées d'action: les étudiants seront mardi dans la rue, avant une journée nationale d'action jeudi puis le 6 novembre. Le président joue gros à 18 mois de la présidentielle: il a fait de cette réforme, qui repousse de 60 à 62 ans l'âge minimal de départ à la retraite, une priorité de la fin de son mandat et le symbole de son engagement à changer la France. Mais sa fermeté face aux grévistes est dénoncée comme un «refus du dialogue» par les syndicats et l'opposition de gauche, tandis que l'hostilité des Français à son égard continue de se creuser, avec 29% d'opinions favorable (-3 points en un mois) selon un sondage Ifop paru dans le Journal du Dimanche. Hier, la France connaissait encore des pénuries de carburants, avec une station sur quatre à sec et des difficultés concentrées en région parisienne et dans l'ouest, selon les autorités. Evoquant une «lente amélioration» mais refusant de donner une date de retour à la normale, le ministre de l'Energie, Jean-Louis Borloo, a appelé samedi soir à la reprise du travail dans les 12 raffineries du pays, toutes en grève et à l'arrêt, affirmant que le pays était «passé à côté d'une crise d'une extrême gravité». Selon les sites Internet sur le prix des carburants, devenus le point de ralliement des automobilistes à la recherche de stations ouvertes, un peu plus d'un tiers des 12.300 stations françaises étaient encore à court de carburant. La situation pourrait encore se dégrader demain, selon l'Union française des industries pétrolières, du fait du repos obligatoire des chauffeurs de camions-citernes qui alimentent les pompes. Outre les blocages du secteur pétrolier, la contestation s'est poursuivie ce week-end avec des perturbations dans les chemins de fer, des manifestations sur les routes, et des grèves d'éboueurs dans plusieurs grandes villes, comme Marseille (sud-est) ou Toulouse (sud-ouest). Pour jeudi, qui sera la septième journée d'actions nationale depuis la rentrée, les syndicats espèrent malgré les vacances faire aussi bien que lors des précédentes mobilisations, où entre 1,1 et 3,5 millions de personnes (selon les sources) étaient descendues dans les rues. Mais s'ils ont réussi à maintenir la mobilisation à un niveau inégalé en France depuis 15 ans, la gestion de la sortie du conflit pour des syndicats s'annonce à hauts risques en raison de la pression de la base et des divergences de stratégie. La promulgation de la loi par Nicolas Sarkozy est envisagée autour «du 15 novembre», a déclaré hier à la radio Europe 1 son conseiller social, Raymond Soubie. Il a assuré qu'il n'y aurait «ni vainqueur, ni vaincu» à l'issue du bras de fer. «Cette réforme passera, c'est une victoire pour la France et les Français», a-t-il estimé, saluant l'attitude «responsable» des syndicats.