Certains hommes ne voient dans la femme que l'objet de leur désir. Le Code du travail a démontré ses limites dans la répression de ce phénomène. Samia, jeune fille célibataire de 25 ans, s'est embourbée dans le chômage pour avoir repoussé les multiples tentatives de séduction de son supérieur. «J'ai quitté l'entreprise en courant. Aujourd'hui, je chôme», dit-elle laconique, dans un témoignage diffusé, hier, à l'émission hebdomadaire «Femmes et avenir» sur les ondes de la Radio Chaîne III. La bravoure féminine est en butte à l'autorité du mâle. Combien sont les filles et femmes qui résistent et gagnent leur «duel»? se demande Mme Fatma Oussedik, sociologue de renom et membre du réseau Wassila. Avant de répondre: «La plupart cèdent au chantage, car elles n'ont pas d'autre choix.» Cette pression, Mme Salhi Soumia, présidente de la commission des femmes travailleuses de l'Ugta, est allée la chercher dans ces contrats de courte durée accordés aux demandeuses d'emploi. Le contrat à durée indéterminée peut coûter cher à la femme. Il vaut son honneur et sa dignité. Des propriétaires d'entreprises abusent de leur pouvoir. La cible de ces prédateurs est souvent connue. Ce sont des femmes fragiles et fragilisées, des cuisinières et des femmes de ménage dans des situations précaires (socio-économique, socio-familiale...). «Ce n'est pas étonnant», explique Mme Salhi. Tétanisées par la honte, le risque d'être vouées au chômage à perpétuité et au regard d'autrui, ces filles se noient dans une mer de silence. Et c'est là que le phénomène s'aggrave. Dans son intervention très riche en enseignements, l'invitée de la radio persiste: «La honte est beaucoup plus pour l'auteur du harcèlement, qui souvent est père de famille. C'est lui qui est l'objet de scandales.» Elle ne pouvait mieux dire. Le problème est que ces «professionnels» du harcèlement «ne se remettent jamais en cause». Pis, «c'est la fille qui est incriminée même au sein de la famille». On opte toujours pour le silence, de peur de ne pas se faire entendre. «Ces loups à la recherche d'une proie facile», comme le dit si fort Mohamed Benradouane, ex- ministre des Affaires religieuses, font preuve de manque de respect criant à l'égard des femmes. Pour eux, «la femme n'est qu'un corps, ils comptent assouvir leurs besoins sexuels», regrette Mme Oussedik. Argumenant ses dires, la sociologue affirme que des femmes, approchant la soixantaine, des filles portant le djilbab subissent des harcèlements quotidiens, au travail... et dans la rue. Cependant, «ces filles et femmes valent par leurs idées, leur responsabilité...et leur intelligence», défend-elle. Elles ne sont pas des objets sexuels. Même si le phénomène n'est pas spécifique à l'Algérie, il devrait être combattu par toutes les parties concernées. Et dans ses racines. Quels sont les mécanismes devant être mis en place pour protéger le femme? Où est le ministère du Travail? Où sont les autorités? Autant de questions posées par Mme Oussedik, demeurent en suspens. La femme, très présente dans le milieu du travail et occupant des postes réservés jadis au sexe fort, doit être protégée. Mme Salhi est de cet avis. «Le harcèlement est un délit qui doit être sévèrement sanctionné», insiste l'intervenante à la radio. Elle ajoute: «Il n'existe rien dans le Code du travail.» Le seul article qui évoque ces sanctions, article 41 bis, «a démontré ses limites». Un colloque est prévu pour porter des modifications à ce code jugé «insignifiant». Mme Oussedik, quant à elle, lance un message lourd de sens: «Que l'Etat nous garantisse l'application de la loi!» Le combat est très long. Consciente, la sociologue indique: «Nous paierons un prix cher, mais l'avenir nous appartient.»