Après un demi-siècle de dictature et de régimes autoritaires, le pays a commencé à voter peu après 07h00 pour départager les deux postulants Cellou Dalein Diallo (ancien Premier ministre) et Alpha Condé (opposant historique). Les Guinéens votaient hier pour choisir le premier président démocratiquement élu de leur histoire, au terme d'une longue et pesante attente depuis le premier tour de scrutin du 27 juin, troublée par des violences politico-ethniques. Après un demi-siècle de dictature et de régimes autoritaires, le pays a commencé à voter peu après 07h00 pour départager les deux postulants Cellou Dalein Diallo (ancien Premier ministre) et Alpha Condé (opposant historique).Au premier tour, Diallo était arrivé largement en tête, avec 43% des voix, devant Condé, 18%. Mais le scrutin reste ouvert, du fait des alliances nouées entre les deux tours. A Conakry, les électeurs affluaient dans les bureaux de vote dès le lever du soleil. «Tout le monde est pressé d'en finir avec l'ancien système, la gabegie, les détournements», assure Saidou Cissé, médecin retraité de 67 ans. «Avant, celui qui s'asseyait au pouvoir, la caisse était pour lui et sa famille. Résultat: la Guinée est riche, avec sa bauxite, son fer, etc., mais on vit misérablement». Après 26 ans de régime militaire, «on va enfin avoir un chef élu par le peuple et pour servir le peuple!», renchérit Hélène Boiré, professeur de 55 ans. «C'est la fête, mais les gens resteront tendus tant que les résultats n'auront pas été acceptés, sans dérapages». Les résultats provisoires ne devaient pas être connus avant mercredi. La campagne a été marquée, fin octobre, par des épisodes de violences politico-ethniques, à Conakry et dans plusieurs villes de l'Est, qui ont fait des dizaines de blessés et au moins un mort, selon les témoignages. Les deux candidats, issus des deux plus importantes ethnies peule (Diallo) et malinké (Condé), ont finalement surmonté leurs rancoeurs, vendredi, pour se donner publiquement l'accolade et lancer un appel conjoint à la fraternité. «Nous, les militaires (...) sommes résolus à accompagner et enraciner la démocratie», a solennellement réaffirmé de son côté l'ancien général putschiste Sékouba Konaté, président de la transition depuis dix mois. Après son indépendance, en 1958, l'ex-colonie française avait d'abord connu les 26 années de «présidence à vie» d'Ahmed Sékou Touré, révolutionnaire qui voulait instaurer une société socialiste et se mua en dictateur paranoïaque. Le «général-paysan» Lansana Conté s'imposa ensuite, pour 24 années de régime militaire gangrené par la corruption. Puis, le capitaine Moussa Dadis Camara se présenta comme le «sauveur» du pays, fin 2008, avant d'apparaître en dirigeant mégalomane et agité. Pour Assiatou Touré, une Guinéenne de 67 ans, le président élu aura la tâche immense de «sortir le pays de la souffrance». «Nous n'avons jamais eu d'électricité ni d'eau dans les maisons et mangeons difficilement deux fois par jour. Et depuis la mort de Conté, il n'y a même plus d'activité», dit-elle. Le candidat Diallo, 58 ans, a passé plus de 10 ans au gouvernement sous le régime de Conté. Puis il a gagné la stature d'un «combattant de la liberté» quand il a été blessé par les militaires, lors du massacre du 28 septembre 2009 (157 morts) dans un stade de Conakry. De son côté, Condé, 72 ans, conserve une aura d'inusable opposant, n'ayant jamais participé à aucun gouvernement. Longtemps exilé, il a été condamné à mort par contumace en 1970 puis emprisonné de 1998 à 2000. Après le premier tour, Diallo a obtenu le ralliement de l'ex-Premier ministre Sidya Touré, un Soussou. Mais le transfert de ses voix (12%) n'est pas nécessairement automatique, de nombreux Guinéens pratiquant encore un vote ethnique.