Youcef Sayah est journaliste et animateur de deux émissions littéraires, l'une à la Radio nationale Chaîne III et l'autre à la Télévision nationale chaîne Canal Algérie. Il fait aussi partie du commissariat du festival et il a eu à modérer un certain nombre de conférences-débats. Il évalue, dans cet entretien, cette 15e édition et la deuxième organisée sous l'égide du ministère de la Culture. L'Expression: Les avis sont partagés concernant l'aspect organisationnel de ce Salon. Quelle est votre opinion là-dessus? Youcef Sayah: Vous me posez une question qui va me mettre dans l'embarras. C'est vrai que je suis journaliste à la radio et à la télévision mais en même temps, je suis membre du comité d'organisation comme vous voyez. Je ne pourrais pas être négatif. Depuis l'édition de l'année dernière, donc depuis que le Sila est organisé par le ministère de la Culture, on tient absolument compte de tous les avis pour l'amélioration constante de ce salon. C'est clair que l'année dernière, il y avait des manques, c'est clair que cette année, il y a encore des manques. Chaque année, nous essayons d'améliorer. Cette année, nous avons par exemple remédié à pas mal d'insuffisances relevées sur le plan technique. Par exemple, nous avons aménagé les salles de conférence en dehors du chapiteau. Cela a permis d'avoir un tiers d'exposants en plus. Dire que tout va pour le mieux, c'est faux. Contrairement aux éditions précédentes, on a constaté qu'il y a eu plus d'invités de marque et de renommée mondiale. C'est l'édition où il y a eu le plus de célébrités et vous avez réalisé l'équilibre entre intellectuels écrivains de l'Occident et ceux d'Orient. Comment avez-vous réussi à obtenir cette palette variée? C'est un énorme travail qui se fait sur plusieurs mois. Nous avons décidé, dès le départ, de faire une chose: l'année dernière, on a multiplié le nombre de conférences. Il y avait des conférences, le matin, l'après-midi et simultanément dans les deux salles. On a ainsi constaté que les conférences drainaient peu de monde le matin. On a tablé sur l'après-midi, à partir de 14 heures. On s'est dit, il vaut mieux cibler des grands noms aussi bien du monde arabe comme Azmi Bishara, Djemaï, Mesbahi, et des européens comme Clément Moore, Henry Patrick Poivre d'Arvor, Benjamin Stora. Donc vraiment, il y a eu diversité afin que ce soit véritablement un Salon international. Avez-vous tenté de toucher des auteurs des pays voisins ou issus des pays arabes, mondialement connus, à l'image de Tahar Ben Jelloun ou Amin Maalouf? Il faut savoir une chose. Personnellement, j'étais en contact l'année dernière avec Amin Maalouf. Ce sont des auteurs qu'il faut «commander» au moins deux années à l'avance. Les auteurs de cette stature ont un calendrier de rendez-vous internationaux tellement chargé qu'il faut s'y prendre au moins deux ans à l'avance. Il faudrait que nous prenions compte de cette difficulté. Le Sila a, aujourd'hui, une place internationale reconnue mais ce n'est pas non plus le premier salon international du livre du monde. Par ailleurs, il faut savoir qu'il y a deux sortes de salons du livre. Il y a un Salon des professionnels où il n'y a pas de visiteurs comme celui de Frankfurt ou celui de Bologne... C'est un salon où sont invités des auteurs et c'est là où généralement, ils vont pour faire vendre à leur maison d'édition leurs droits pour être traduits dans une autre langue. C'est là où, bien évidemment, les auteurs sont des faire-valoir pour faire vendre les droits à d'autres pays et puis il y a les salons comme celui de Casablanca, Alger, Paris... Comme on a eu à le constater depuis le 27 octobre dernier, des centaines de milliers de visiteurs ont afflué vers ce salon. Cet engouement est un démenti formel à toutes les thèses faisant état d'absence d'intérêt de la part des Algériens pour la lecture. Ce salon ne vous donnerait-il pas l'idée de mettre en place un programme tout au long de l'année autour du livre et de la promotion de la lecture, avec l'invitation d'auteurs mondialement connus pour des ventes- dédicaces et des conférences et ce, au moins une fois par mois? Il ne faut pas confondre les rôles. Il y a les auteurs qui sont invités par les éditeurs. C'est le rôle des éditeurs. Chaque éditeur a la latitude d'inviter son auteur pour organiser en librairie ou dans une salle, la tenue des ventes-dédicaces. Ce travail n'est pas du tout le rôle du commissariat du Salon du livre. Nous ne nous occupons absolument pas des ventes-dédicaces dans les stands même dans le cadre du salon. Le commissariat du salon prend en charge les animations: conférences, tables rondes et hommages qu'on organise. A ce moment-là, les auteurs sont nos invités. Par exemple, Patrick Poivre d'Arvor est invité par le Salon du livre parce qu'il va faire une conférence. Il est donc sollicité par les éditions «Edif 2000» pour assurer une séance de vente-dédicace.