Les responsables des Douanes mettent l'accent sur la lutte contre la corruption au sein de leurs rangs. Les douaniers sont corrompus. Pas tous les membres de la corporation bien sûr, mais les dégâts causés à l'économie nationale ne se mesurent pas au nombre de gens corrompus. Rien que pour le premier semestre de 2010, les Douanes ont eu recours à 65 dépôts de plainte pour corruption et délits assimilés. En 2009, il y a eu le transfert de dix dossiers à la justice. C'est ce qu'a indiqué hier Abdelmadjid Mahrèche, inspecteur général des Douanes algériennes, invité de la Chaîne III. Selon lui, les différentes mesures prises au sein des douanes pour contrer la corruption, commencent à porter leurs fruits. Au niveau des aéroports, il existe des caméras de surveillance qui relèvent des douanes et des services de sécurité et qui permettent de détecter des cas de corruption, a-t-il dit. Des rappels ont été faits sur les enquêtes effectuées actuellement sur deux affaires à l'aéroport d'Alger et au port d'Oran. Le même responsable explique qu'il s'agit d'effets vestimentaires qui s'étaient retrouvés hors dépôt. Le dossier de la corruption est, selon lui, suivi de près par le directeur général des Douanes, Mohamed Abdou Bouderbala, et par le ministre des Finances, Karim Djoudi. Il a rappelé l'installation au sein des douanes d'un comité opérationnel permanent de lutte contre la corruption, composé de fonctionnaires de l'Inspection générale des finances et de l'Inspection générale des Douanes. Ce responsable rappelle aussi l'existence d'un avant-projet de cartographie de postes sensibles à la corruption et qui est en cours d'élaboration. «Il s'agit surtout de postes où les douaniers sont en contact direct avec les importateurs. Nous avons une cartographie des zones de courants de fraude. Nous avons projeté d'installer 85 postes de surveillance le long des frontières est, ouest et sud-ouest», a-t-il souligné. Pour les autres infractions et délits, Abdelmadjid Mahrèche a annoncé que 150 agents de douanes ont été poursuivis en justice en 2009. Pour les premiers mois de 2010, 80 dossiers sont traités par la commission nationale de discipline et 65 cas de poursuite en justice pour diverses infractions, a-t-il précisé. Les douaniers sont souvent les complices des importateurs indélicats. Les responsables s'abstiennent d'avancer un quelconque chiffre sur le manque à gagner pour les recettes des Douanes suite à l'importation des produits de contrefaçon, secteur échappant par définition à toute emprise des institutions officielles. Ils se contentent d'expliquer que le pays ne cesse de renforcer sa législation et ses moyens matériels pour lutter contre ce phénomène en excluant toute ambition d'en venir à bout. Les responsables des Douanes pensent que la Chine et les Emirats arabes unis sont des lieux de provenance des produits contrefaits. Ce qui laisse à penser que les corrupteurs sont en lien avec cette activité d'importation. Les médicaments, les produits alimentaires, l'électroménager et les cosmétiques sont les produits les plus prisés par les trafiquants à côté des pièces de rechange. S'ils sont de mauvaise qualité, quand ils ne sont pas contrefaits, ils constituent un grand danger pour les consommateurs. Les détenteurs de marques ont déposé plusieurs plaintes auprès de la justice, même si la démarche n'est pas appliquée par toutes les victimes des fraudes: les délais étant longs avant d'obtenir un jugement. Pour preuve, il est constaté que 100 affaires sont toujours devant les tribunaux depuis 2008 et sont en attente de jugement. D'autres affaires ont, par contre, vu leur dénouement au sein de cette instance. Le fait qu'un jugement mette entre trois à quatre ans pour être prononcé n'est pas sans poser quelques problèmes aux Douanes. Qui paie les frais d'emmagasinage et de destruction? s'interroge-t-on. Faut-il que les Douanes ou le Trésor public se chargent de cette dépense? Une demande est lancée auprès du ministère de la Justice pour tenter d'accélérer les procédures de jugement, mais cette démarche n'a pas encore abouti. Des conteneurs entiers sont alors déposés dans les dépôts des Douanes situés à Sidi Moussa, dans la wilaya de Blida. Leur contenu est en attente de destruction ou de vente aux enchères publiques. Cependant, des difficultés d'une autre nature entravent l'action des Douanes. Dès qu'il y a une alerte sur l'importation d'un produit contrefait comme la pièce détachée, les importateurs se donnent le mot pour se rabattre sur d'autres marchandises où la surveillance est moindre.