Les Douanes algériennes veulent se réformer et lancent, à travers un nouveau règlement intérieur, une véritable opération «mani pulite» au sein de ce corps où les actes de malversations, de corruption et de vols caractérisés de marchandises ne sont un secret pour personne. Selon un haut responsable des Douanes, la direction des ressources humaines dénombre chaque année 4 à 5 cas de corruption et une trentaine de cas de malversations commis par des agents douaniers. Trois commissions de discipline, installées en vertu de la nouvelle réorganisation des services des Douanes, traitent tous les 45 jours environ cinq cas de fraude. Rien qu'au niveau de l'aéroport d'Alger, 15 agents fraudeurs ont été suspendus dernièrement de leurs postes, dont les dépassements ont été interceptés par leurs collègues et les services de sécurité aéroportuaires. Selon M. Boudjaltia Djazouli, directeur des ressources humaines auprès de la Direction générale des douanes (DGD), «l'administration douanière a amendé récemment le règlement intérieur régissant le corps des douaniers à travers l'introduction de mesures visant à renforcer le contrôle interne et réduire la durée d'affectation de ses agents dans certains postes». Ce nouveau dispositif sera appliqué vers la fin de l'année, en même temps que la mise en oeuvre du nouveau statut du douanier. Selon M. Djazouli, il a été rendu nécessaire par 'le besoin d'assainir et de réorganiser certains services douaniers pouvant constituer une source de corruption et de malversations». Il est clair que l'institution douanière semble bien partie pour faire la chasse aux corrompus et à la corruption qui gangrène ce corps. Les postes sensibles aux aéroports, ports et postes frontaliers ainsi que les services de dédouanement de marchandises, de voitures et de documents d'import-export sont particulièrement visés par ces réformes. Pour le DRH des douanes, ce nouveau règlement porte sur «le comportement du douanier au quotidien aussi bien vis-à-vis des usagers que de l'administration ainsi que sur l'éthique douanière», et «tout dépassement sera sévèrement sanctionné» en vertu de ce dispositif. La nouvelle mouture du règlement intérieur des Douanes prévoit un partage de responsabilité entre l'agent douanier et son supérieur hiérarchique en cas d'infraction: »Si un agent douanier commet un dépassement, son supérieur sera sanctionné au même titre que lui pour ne pas avoir exercé de contrôle sur son subordonné, et les responsables sont sommés, en vertu de ce dispositif, 'de rendre compte de leur travail et de celui de leurs subordonnés». L'autre nouveauté de ce règlement intérieur est la limitation drastique de la durée d'affectation des agents, inspecteurs et responsables à des postes sensibles, c'est-à-dire des postes où la corruption peut être exercée sur des douaniers. La durée de mobilité, fixée actuellement entre un (1) et trois (3) ans, sera réduite à six mois pour des 'postes jugés sensibles'' comme celui du liquidateur qui est l'agent chargé de la liquidation des déclarations de marchandises au niveau des ports et aéroports. Cette mesure, selon M. Boudjaltia,» mettra fin à l'immobilité de certains agents douaniers» qui occupent parfois ces postes durant une trentaine d'années, situation qui favorise souvent les actes de corruption. En fait, la direction générale des Douanes serait en train de revoir les missions du liquidateur pour introduire un double contrôle dans la liquidation des marchandises et mettre en place un autre contrôle indépendant sur ces agents. Toutes ces nouvelles missions seront bientôt définies par un texte en cours d'élaboration. Et, dans cette perspective de modernisation de l'administration douanière, la DGD projette de réorganiser ses directions régionales et ses inspections divisionnaires en procédant à un découpage territorial qui va notamment définir de nouveaux postes organiques et fonctionnels. Premier rempart de défense de l'économie nationale, les Douanes ont souvent été la cible de critiques virulentes, autant des citoyens que des opérateurs. Motif : la corruption qui gangrène ce corps de la fonction publique, censé protéger l'économie nationale de toutes menaces extérieures ou intérieures. Pour autant, un nouveau règlement intérieur est-il de nature à donner un autre visage à ce corps institutionnel, en affectant dans tous les postes sensibles des «Elliot Ness», et ailleurs des travailleurs qui font le boulot pour lequel ils sont payés ? Le corps des Douanes compte environ 17.000 agents et ambitionne de renforcer ses rangs pour atteindre 20.000 agents en 2011. Mais, en dépit de beaucoup de critiques, il n'en demeure pas moins que ce corps a été souvent la cible d'actions armées orchestrées par des terroristes, des bandits et des trafiquants en tout genre.
