Les citoyens de la région donnaient l'impression, au lendemain du scrutin des locales, de sortir d'une longue nuit de cauchemar. Au-delà de la satisfaction que les uns et les autres n'hésitaient pas à afficher quant à la réussite du rejet du scrutin, la majorité silencieuse s'est vu de nouveau plonger dans un climat chargé d'interrogations et d'inquiétude. Un climat aggravé par les déclarations de satisfecit des délégués sans pour autant faire preuve d'un palliatif à ce qui est communément appelé «un vide constitutionnel». L'épouvantail agité par les différentes coordinations de «mettre en quarantaine les nouveaux élus et d'empêcher l'installation des Assemblées du scrutin du 10 octobre» a donné lieu à un débat sur la gestion de l'après-10 octobre. Des solutions de rechange ont alors vu le jour au cours des différents conclaves tenus au lendemain du scrutin. Sous la pression de l'opinion locale, certains délégués ne se sont pas empêchés de proposer la formation de «conseil communal» et de «conseil de sages», autant de propositions reprenant au vol celle faite par l'autonomiste en chef, Ferhat M'henni. Ces propositions portées à la connaissance de l'opinion ont permis, cependant, de mieux voir les intentions des uns et des autres concernant le règlement du conflit. Mais la situation chaotique demeure redoutée devant l'absence d'une solution à même d'atténuer l'inquiétude. La récente mesure annoncée par le porte-parole du gouvernement paraît à première vue, «salutaire et porteuse d'espoir de voir la paralysée totale s'éloigner de plus en plus», disait hier un universitaire. Le même son de cloche est à relever chez l'ensemble des fonctionnaires des collectivités locales qui redoutaient de voir ce conflit les toucher directement. Ce sentiment d'assurance est, aussi, facilement décelable chez la majorité des citoyens qui voit le spectre d'un blocage et d'une paralysie des institutions de base disparaître peu à peu. La majorité silencieuse, meurtrie et saignée depuis de long mois, respire mieux, mais sans pour autant voir le bout du tunnel. La société kabyle jusque-là silencieuse et passive aux méthodes de gestion du conflit des uns et des autres, pourrait aller dans le sens de la constitution d'une 3e voie salvatrice pour la région. La gestion policière des uns et les pratiques fascisantes des autres n'augurent rien de positif. Bref, la société kabyle refuse l'aventurisme. Les solutions provisoires, quand bien même elles représenteraient le moindre mal, sont rejetées en bloc. «On veut des solutions définitives», rétorquent de nombreux citoyens lors de l'anarchie qui s'est érigée en maître depuis près de deux ans en Kabylie.