La fourniture à Moscou d'un tel navire constitue une première pour un pays de l'Alliance atlantique. La France et la Russie vont construire ensemble, au profit de Moscou, deux navires de guerre de type Mistral au terme d'un accord, annoncé vendredi, qui avait suscité la réticence de plusieurs pays de l'Otan dont les Etats-Unis. La fourniture à Moscou d'un tel navire constitue une première pour un pays de l'Alliance atlantique. Elle a suscité des critiques de Washington et des pays baltes, membres comme la France de l'Otan. La Géorgie, en guerre avec la Russie à l'été 2008, avait aussi dénoncé la perspective d'une telle vente. «Au terme de l'appel d'offres international lancé le 5 octobre pour la fourniture à la Marine russe de deux bâtiments de projection et de commandement (BPC), les autorités russes ont retenu l'offre présentée par le consortium formé par les industriels français Dcns et STX et les chantiers navals russes OSK», a indiqué un communiqué conjoint de l'Elysée et du Kremlin. Le Mistral (BPC) est un navire de guerre polyvalent capable de transporter des hélicoptères et des chars, d'accueillir un hôpital de campagne et/ou un état-major embarqué. «L'offre du consortium prévoit dans un premier temps la construction en commun de deux navires qui devrait être prolongée par la fabrication de deux unités supplémentaires», ajoute le communiqué des deux présidences. Aucune indication n'a été donnée sur la fourniture ou non par la France d'équipements spécifiques comme de l'électronique embarquée ou des systèmes informatiques. Début décembre, le Premier ministre français François Fillon avait affirmé que Paris ne se limiterait pas à la fourniture d'une coque vide. Il n'y a «aucun problème s'agissant des transferts de technologies», avait-il dit. Les tractations franco-russes, lancées en mars à Paris, auront duré neuf mois. La France s'était alors déclaré prête à vendre à la Russie jusqu'à quatre Mistral au coût unitaire d'environ 500 millions d'euros. Les dernières négociations ont porté sur le montant du contrat, non révélé vendredi. Cet accord «illustre la volonté et la capacité de la France et de la Russie de développer des partenariats d'envergure dans tous les domaines, y compris celui de la défense et de la sécurité», précise le communiqué. Pour la France, la Russie n'est plus l'adversaire honni de la Guerre froide et aucune menace ne justifiait le refus d'une telle vente. Selon un télégramme datant de février dernier et diffusé par le site WikiLeaks, le secrétaire américain à la Défense Robert Gates a fait part à son homologue français, à l'époque, Hervé Morin, des «préoccupations» américaines face à la perspective d'une acquisition de Mistral par la Russie. Selon Washington, cette décision envoie un mauvais signal aux alliés d'Europe centrale et de l'Est qui continuent de craindre Moscou. La crise économique a aussi été un facteur déterminant dans la décision de la France - qui peine par ailleurs à vendre son avion Rafale à l'étranger - de signer un contrat d'armement avec la Russie. Dans leur communiqué, les présidents russe, Dmitri Medvedev et français, Nicolas Sarkozy «se félicitent de la concrétisation de cette coopération sans précédent, qui bénéficiera à l'industrie et à l'emploi» dans les deux pays. L'Elysée a ajouté dans son communiqué un paragraphe pour souligner que «la construction des BPC pour la Russie représentera pour les industriels français Dcns et STX l'équivalent de 5 millions d'heures de travail ou (l'emploi de) 1000 personnes pendant quatre ans, en majorité à Saint-Nazaire», ville portuaire du nord-ouest de la France.