La Libye a officiellement informé la Ligue de son intention de se retirer de cette organisation Une nouvelle fois Tripoli exprime, à sa manière, son ras-le-bol du «défaitisme» arabe. En déposant officiellement, jeudi, une demande de retrait de la Ligue des Etats arabes, la Libye ouvre une crise avec l'organisation panarabe. La demande a été confirmée, hier, par le porte-parole de la Ligue arabe, Hicham Youssef, qui a déclaré aux agences de presse que «la ligue a reçu, jeudi, un mémorandum officiel de la Libye l'informant de sa volonté de se retirer de l'organisation». Le même jour, une source officielle du secrétariat populaire libyen de l'Unité africaine (ministère des Affaires étrangères) confirmait que Tripoli «a informé officiellement la Ligue arabe de son intention de se retirer de cette organisation» sans donner d'autres explications à cette décision des autorités libyennes. Dépit de la Libye face à l'inaction arabe, notamment dans l'affaire palestinienne et l'impuissance des Arabes face aux menaces de frappes américaines contre l'Irak. Jusqu'à plus ample informé, c'est l'explication la plus plausible de cette volonté de retrait, pas aussi intempestive que l'on pourrait l'estimer. En effet, les observateurs relèvent que cette demande de retrait n'est pas la première démarche du genre effectuée par la Libye quoique, cette fois-ci, cela semble un peu plus sérieux. Déjà en 1998, dans le sillage de l'affaire Lockerbie, et de l'embargo imposé à la Libye par les Nations unies, Tripoli avait menacé de quitter la ligue devant le peu de répondant de la part des Etats arabes à soutenir plus activement la Libye face à cette épreuve. Plus récemment, à la veille du Sommet arabe de Beyrouth, en mars dernier, la Libye avait menacé de se retirer de l'organisation arabe, suite au différend l'opposant au Liban, à propos de la mystérieuse disparition de l'imam Sadr à Tripoli dans les années 70. Aujourd'hui, c'est la situation dans les territoires palestiniens occupés et l'inaction arabe, mais plus probablement encore, l'impuissance arabe à aider les Palestiniens, mais aussi à prévenir une attaque contre l'Irak, qui a amené la Libye à prendre cette décision extrême. De fait, lors du sommet en juillet dernier de la Comessa (Communauté des Etats sahélo-sahariens) le guide libyen, le colonel Maâmar El Gueddafi, a fustigé les Arabes, déclarant notamment «Les Arabes doivent cesser de mendier 42% de la Palestine alors que les Africains n'ont pas lâché un seul pouce de leur territoire». De fait, El Gueddafi, qui a voulu unifier la Nation arabe, a fini par y renoncer devant la vanité de ses efforts, se tournant alors vers l'Afrique où, la manne de la fortune de la Libye aidant, il fut à l'origine de la fondation de la Comessa et l'un des promoteurs de l'Union africaine. Ayant le parler franc et direct, le guide libyen, qui ne supporte pas l'inaction, a dit en fait tout haut ce que le commun des Arabes pense tout bas: l'échec patent des dirigeants arabes à faire rendre justice aux Palestiniens et à protéger les Irakiens. Ecourtant sa visite officielle au Portugal, le secrétaire général de la Ligue arabe, l'Egyptien Amr Moussa, va se rendre à Tripoli pour tenter de désamorcer la crise. Minimisant la chose, Amr Moussa a déclaré à son arrivée à l'aéroport du Caire dans la nuit de jeudi à vendredi: «Nous croyons que ce que la Libye a fait est une sorte de protestation contre la position arabe en général». Plus explicite, un responsable de la Ligue arabe, sous le couvert de l'anonymat a estimé que «la décision libyenne traduit l'impatience de Tripoli, qui réclame des décisions concrètes concernant le conflit israélo-palestinien et les menaces américaines d'intervention en Irak»