L'Algérie pleure le manque de compétences au moment où des Algériens expatriés se font distinguer à l'étranger. Un tableau noir a été dressé, hier, par des experts sur la situation des ressources humaines dans les entreprises algériennes. L'université ne fournit pas les compétences nécessaires aux entreprises en matières de ressources humaines et les entreprises ne valorisent pas leurs ressources. Cela engendre un manque drastique dans les compétences et une grande régression des entreprises en matière de compétitivité. A cela s'ajoutent la fuite des cerveaux à cause du peu de perspectives existant au sein des entreprises et le système archaïque en sus du système de rémunération et le manque de valorisation des compétences. C'est l'alarmant constat fait lors de la table ronde sur les ressources humaines dans les entreprises, organisée par le forum El Moudjahid. D'emblée, le directeur général de l'Institut supérieur de gestion et de planification (Ingp), Raked M'hamed, a fait remarquer que les entreprises algériennes sont confrontées à une pénurie des compétences en matière d'expertise. «Malheureu-sement, les conditions actuelles ne favorisent pas un recrutement de qualité et l'université ne fournit plus ce type de qualification», a-t-il souligné, précisant que sur 100 postulants à un poste dans ce domaine, seuls 5 ou 6 candidats répondent aux exigences. Il a ajouté, qu'il est difficile de mobiliser le peu qui reste à cause de la pression et de la demande. De son côté, Abderrahmane Moufak, responsable à l'Institut national de productivité et du développement industriel (Inped) a estimé que les entreprises algériennes sont menacées même dans leur existence. «Nos entreprises sont confrontées à un problème d'existence et pour survivre, il faut qu'elles deviennent compétitives en renforçant la qualité de leur production», a-t-il soutenu. Selon lui, la compétitivité est liée à trois facteurs. Il s'agit de la compétence des ressources humaines, de la motivation du personnel et de l'environnement de l'entreprise. L'intervenant déplore les insuffisances et défauts du système de rémunération qui doit, selon lui, être revu, corrigé et restructuré. «Au lieu de rémunérer les compétences, on rémunère la présence», a-t-il dénoncé. Du reste, la fuite des cerveaux est liée à cette problématique, relève le représentant de l'Inped. De son côté, le directeur de l'Ecole supérieure de gestion, Mohamed Belkacem, a mis l'accent sur le phénomène de raréfaction des compétences dans tous les domaines. «Cette raréfaction engendre un déséquilibre dans le marché de l'emploi et ce déséquilibre produit la baisse de la main-d'oeuvre», a-t-il estimé, arguant qu'une entreprise employant 500 travailleurs perd entre 20 et 30 employés chaque année. «Il y a un désinvestissement dans les ressources humaines et il n'y a pas de mesures pour développer le domaine et si les parties concernées - pouvoirs publics, institutions, administration... -ne prennent pas les mesures adéquates, on risque une aggravation de la raréfaction de la main-d'oeuvre», a-t-il averti.«Il y a quelques décennies, l'Algérie exportait de la main-d'oeuvre et aujourd'hui, on en importe», a-t-il souligné, se demandant «avec quelles compétences le plan quinquennal 2010-2014 sera-t-il réalisé.» L'intervenant déplore également le fait que les entreprises n'utilisent pas suffisamment les nouvelles technologies. Les invités d'El Moudjahid ont regretté aussi, que les entreprises algériennes n'aient pas de stratégie pour le développement des ressources humaines et ce pour atteindre la performance. «La performance n'est pas au coeur des préoccupations des pouvoirs publics et des entreprises», déplore-t-on encore. Ironie du sort, cela se passe au moment où un pays comme la Belgique a élu un cadre algérien, deuxième personnalité du pays en 2010, en guise de reconnaissance de ses compétences. Plus nombreux, sont les Algériens expatriés, distingués à l'étranger qui font cruellement défaut à l'industrie et à l'entrepreneuriat algériens.