La médiocrité des programmes et le traitement démagogique, populiste et superficiel des événements ont fini par lasser les téléspectateurs et la société civile. Si les dernières émeutes qui ont secoué le pays ont dévoilé des carences, les limites de la télévision publique à couvrir les événements et à informer les Algériens sur ce qui se passe dans leur pays figurent en bonne place. Ces limites s'ajoutent bien sûr à une panoplie de défections notamment en matière de communication officielle, la stérilité des positions des partis de l'Alliance présidentielle et leur lecture superficielle des événements. Pour s'informer, comprendre les enjeux de la révolte, les Algériens ont dû suivre ce qui se passe en Algérie sur les chaînes étrangères. De ce fait, l'ouverture du champ médiatique et notamment audiovisuel au privé et aux débats politiques contradictoires s'impose comme une condition sine qua non pour tout changement de la situation dans le sens positif. «Les Algériens doivent parler de leurs problèmes en Algérie et à travers des canaux algériens pour comprendre tous les enjeux», a plaidé récemment Louisa Hanoune, secrétaire générale du Parti des travailleurs (PT). Cette revendication portée par un large pan de la société revient, à juste titre, suite à ces évènements, alimenter les demandes de la société civile. Dans un communiqué signé récemment par cinq organisations, il est exigé la levée de l'état d'urgence et l'ouverture du champ médiatique, politique, syndical et associatif «afin que les conflits puissent être réglés par la force d'un droit qui prend en charge les intérêts et les préoccupations de la majorité de la population et non pas par le droit d'une force qui protège les intérêts d'une minorité». Mais le blocage instauré par les pouvoirs publics quant à l'ouverture du champ audiovisuel à l'investissement privé, semble s'inscrire dans la durée. A une question d'un député sur l'ouverture du champ médiatique, le ministre de la Communication avait répondu, le 9 décembre dernier, en parlant de l'ouverture de l'unique télévision nationale au débat politique, aucune initiative dans ce sens n'est venue lever le blocus imposé dans ce domaine, depuis l'indépendance du pays. Mieux, des responsables politiques accusent souvent les chaînes étrangères de manipulation et d'exagération dans leur traitement de l'actualité en Algérie. «Il est temps d'ouvrir le champ médiatique pour ne plus accuser les Algériens d'être influencés par les chaînes étrangères», estiment plusieurs citoyens interrogés à ce sujet. Du côté des décideurs, l'ouverture du champ médiatique et des médias lourds notamment l'audiovisuel est renvoyée aux calendes grecques. Pourtant, cette ouverture est revendiquée par des pans entiers de la société, et ce depuis plusieurs années déjà. «Il n'y a ni démocratie ni liberté sans l'ouverture des médias lourds (audiovisuel) à l'investissement privé», argumentent les promoteurs de cette idée. Plusieurs partis politiques, organisations non gouvernementales (ONG) et acteurs du mouvement associatif, exigent pour une meilleure expression de la démocratie dans les milieux de la société, l'ouverture de ce champ squatté, selon eux, par des clans qui se succèdent au pouvoir. L'on se rappelle que des candidats à l'élection présidentielle du 9 avril 2009 ont fait du thème de l'ouverture du champ médiatique un sujet de campagne. Même l'Organisation mondiale du commerce (OMC) a demandé à l'Algérie l'ouverture du champ audiovisuel au privé, comme préalable à son adhésion. L'espoir suscité par l'ouverture démocratique de l'après-1988, s'est vite estompé avec la remise en cause de cette ouverture elle-même. Les autorités ne semblent pas disposées à procéder à une reconfiguration du paysage médiatique. Le pluralisme politique étant devenu une forme sans un véritable fond. Les pouvoirs publics motivent leur refus, par le fait que le peuple algérien n'est pas encore prêt à assumer une telle initiative qui demande beaucoup de maturité. Un prétexte caduque selon les défenseurs d'une ouverture de ce champ. Pour les observateurs, si un tel pas est franchi, il faut s'attendre à une révolution médiatique sur tous les plans. Et si jamais le champ est ouvert? «Cela soldera une époque et marquera le début d'une autre», estime-t-on.