Dans la nouvelle ère médiatique, malgré l'avènement de la cyber-communication (une forme de communication médiatisée par ordinateur), la télévision reste un support des plus influents. L'Algérie ne fait pas exception. Pourtant, la qualité des programmes présentés par les chaînes publiques nationales sont en parfait déphasage avec les attentes des téléspectateurs. La fermeture du champ audiovisuel en Algérie reste le premier handicap à l'«émancipation télévisuelle». Au lieu d'ouvrir ce champ afin de diversifier les offres et créer ainsi un climat de concurrence salvateur, les pouvoirs publics ont choisi l'«avant-gardisme» (pour la notion) mais inutile du clonage. Cinq chaînes, difficilement classables, ornent le «bouquet» télévisuel algérien : l'emblématique ENTV, ses deux dérivés directs, Canal Algérie et El thalitha (la troisième), ainsi que Errabia (la quatrième) en tamazight et El khamissa (la cinquième), la télé du Coran. Notons que la dénomination (des numéros) ne peut être fortuite. Or, il ne faut pas sous-estimer les attentes de la population vis-à-vis d'un tel outil de communication. Elles sont nombreuses et importantes, car les médias sont l'un des moyens de compréhension et de communication verticale et horizontale entre les pouvoirs publics et le peuple, d'un côté, et entre les différentes strates de la société, de l'autre. Le recours des téléspectateurs algériens aux chaînes satellitaires étrangères (des cartes d'abonnement satellitaires sont achetées à un prix qui avoisine parfois, voire dépasse le montant du SNMG) pour s'informer des événements internes est plus que symptomatique. Se faire expliquer des décisions politiques, économiques ou d'ordre sécuritaire par ces canaux peut constituer un danger pour la cohésion sociale. Sachant qu'aucune interprétation d'un événement (quel qu'il soit) n'est innocente (l'objectivité comme la vérité étant relatives), il y a urgence à présenter au téléspectateur une télévision qui réponde à ses aspirations sans langue de bois. Aucun média n'est dépourvu d'idéologie. A chacun la sienne. Qu'une nouvelle chaîne maghrébine privée, à peine née, se vante (à tort ou à raison) d'être la première station de télévision en termes d'audience est une offense à ses aînées. Même si l'information est erronée, il reste que le peuple a soif d'une station de télévision à laquelle il s'identifie. Ces derniers mois, particulièrement, plusieurs événements ont justifié l'urgence d'une ouverture réfléchie et maturée de nouvelles chaînes de radio et de télévision en Algérie. Il y a d'abord la frustration face à l'agression caractérisée dont a fait l'objet tout ce qui représente l'identité algérienne par les chaînes satellitaires égyptiennes au lendemain des phases de qualification à la Coupe du monde de football. Même si les autorités du pays ont choisi le silence comme réponse, le peuple avait soif de répliquer. Ce qui a d'ailleurs été fait par le biais d'Internet, mais la «rage» n'a pas été complètement assouvie. Un autre phénomène est à mettre en évidence également : le recours aux muftis des chaînes arabophones pour statuer sur des événements locaux est devenu très courant. Un imam d'Arabie saoudite va jusqu'à pratiquement appeler les Algériens à la désobéissance civile face aux nouvelles mesures imposées par le ministère de l'Intérieur concernant le passeport biométrique sans avoir toutes les données sociales du pays. Nos oulémas ont également dénoncé ces mesures mais avec une certaine retenue, sans attiser la haine. Mais qui les écoute et par quel support «crédible» communiquent-ils ? Depuis la semi-ouverture du champ médiatique national en 1991 pour la presse algérienne, le débat sur la nécessité de faire de même pour la radio et la télévision n'a pas cessé. Il est évident que la question est sensible et ne souffre pas d'approximations. Les officiels remettent à chaque fois la question aux calendres grecques et préfèrent parler de la TNT. Des promesses sont faites de temps à autre sur la diversification du champ télévisuel avec de nouvelles chaînes thématiques, mais est-ce cela le problème ? S. A.