La femme tunisienne a démontré au monde entier que l'émeute et la manifestation ne sont pas l'apanage des hommes. En Tunisie, les mouvements de protestation qui durent depuis près d'un mois déjà sont marqués par un fait: la mixité des manifestants. Les femmes tunisiennes ont bravé le régime policier en participant aux actions menées depuis un mois et qui ont abouti à la chute de Ben Ali, de son gouvernement et de son système. Les femmes étaient mobilisées pour contribuer au soulèvement populaire et ont pris part à toutes les actions de rue. Brandissant des banderoles, entonnant à tue-tête des slogans hostiles au pouvoir, la mobilisation de la femme tunisienne, conjuguée à la formidable mobilisation de la société toute entière, a fini par payer. Durant toutes ces émeutes et manifestations, les femmes tunisiennes ont joué un rôle central et prépondérant. Les images en boucle diffusées par les chaînes de télévision étrangères montrant des femmes au milieu des foules ont surpris plus d'un. Jeunes filles pour la plupart, elles ont participé à la révolution des Jasmins. L'implication de la femme dans les événements de Tunisie a démontré également l'avance prise par rapport aux autres pays de l'Afrique du Nord et du Monde arabe en général. Politiquement parlant, les femmes tunisiennes n'ont fait que confirmer une certitude: le degré de conscience des Tunisiens et leur capacité à dépasser le raisonnement archaïque des sociétés islamisées à outrance et qui voient en la femme une créature éternellement mineure. D'ailleurs, plus que dans tout autre pays de la région, les Tunisiennes se considèrent comme étant des citoyennes à part entière dans le pays; l'égalité entre les hommes et les femmes étant une réalité palpable et non un slogan. Qui osera donc dire encore que la femme doit rester toujours dans son foyer quand les hommes font la guerre et l'insurrection dans les rues? Pas les Tunisiens en tout cas. A plus forte raison que les islamistes n'ont aucune influence dans ce pays qui a jusque-là, rompu avec toute idéologie extrémiste. Le caractère mixte des mouvements de protestation dissuadera le dernier des hommes qui aura cru que la femme est pour toujours - à défaut d'être son égal - un être qui lui est inférieur. Les émeutes en Tunisie ont démontré un autre fait marquant en dehors de la destitution de Ben Ali par un mouvement populaire- qui est celui de l'accélération extraordinaire et très rapide des événements. Sous d'autres cieux, des soulèvements populaires qui ont duré plusieurs mois n'ont abouti à aucune décision historique. En Tunisie, un mois de protestations, qui a été jalonné par trois discours présidentiels, a abouti au limogeage de deux ministres, la dissolution du gouvernement, l'annonce d'élections législatives anticipées, l'ordre de libération de toutes les personnes arrêtées, l'ouverture du champ politique et médiatique, l'instauration de l'état d'urgence et, signe des temps, la fuite du président Ben Ali de la Tunisie, laissant vacant son poste qui sera occupé par le Premier ministre pour quelques heures avant que le Conseil constitutionnel n'intervienne pour installer le président du Parlement à la tête de l'Etat en attendant qu'une élection présidentielle soit tenue dans un délai de 60 jours. Incroyable scénario et fulgurante précipitation des événements dans une Tunisie qui n'a pas pu supporter un président dont le mandat est renouvelé il y a à peine une année avec plus de 90% des voix exprimées.