Il n'est pas question de discuter d'une suspension des activités d'enrichissement d'uranium de l'Iran lors des pourparlers ouverts vendredi à Istanbul entre ce pays et les grandes puissances, a averti un haut responsable iranien. «Nous ne permettrons absolument pas que les discussions abordent la question de nos droits fondamentaux, comme la question d'une suspension de l'enrichissement d'uranium», a déclaré à la presse Abolfazl Zohrevand, adjoint du négociateur en chef iranien, qui venait de prier dans une mosquée d'Istanbul, à la faveur d'une interruption dans les discussions. «Nous allons nous concentrer sur la coopération», a ajouté l'adjoint du négociateur Said Jalili, alors que les Occidentaux s'opposent aux activités d'enrichissement de l'Iran, redoutant que ce pays ne prépare une bombe atomique. Les discussions, qui ont lieu dans le palais ottoman de Ciragan, face au Bosphore, réunissent la chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton, intermédiaire du groupe des 5+1 (Etats-Unis, Russie, Chine, France, Grande-Bretagne, Allemagne), des représentants de ce groupe, et le négociateur iranien et son équipe. L'Iran poursuit «avec vigueur» ses «activités d'enrichissement» d'uranium malgré les sanctions internationales, avait déclaré samedi dernier Ali Akbar Salehi, le chef du programme nucléaire iranien. «Nous voulons obtenir des réponses sérieuses de l'Iran sur son programme nucléaire et l'affirmation par l'Iran qu'il respectera ses obligations internationales», a déclaré, pour sa part, un diplomate occidental proche des discussions. Le même diplomate assure que «l'échange de combustible sera discuté à Istanbul», mais dans des termes qui doivent être actualisés. L'Iran a rejeté en 2009 un projet du groupe de Vienne (Etats-Unis, Russie, France) prévoyant l'envoi en Russie de 1200 kg d'uranium iranien faiblement enrichi pour obtenir en contrepartie de la Russie et de la France du combustible pour le réacteur de recherche médicale de Téhéran. En mai 2010, l'Iran a présenté avec la Turquie et le Brésil une contre-proposition prévoyant d'envoyer en «dépôt» en Turquie 1200 kg de son uranium pour faire l'échange. Les grandes puissances ont ignoré cette offre. «Les Six sont partisans du dialogue, mais aussi de la fermeté vis-à-vis de l'Iran. Concernant les gestes de bonne volonté, ils ont déjà été faits», a ajouté ce diplomate. «Nous voulons lancer un processus sérieux et concret qui aborde le fond des problèmes posés par le programme nucléaire iranien», a pour sa part déclaré jeudi le porte-parole de la diplomatie américaine, Philip Crowley. «Nous n'attendons aucune grande percée», a précisé plus tard Mark Toner, un porte-parole américain. «Les Iraniens jouent la montre, c'est leur stratégie», a commenté à ce propos l'analyste français et spécialiste de l'Iran Bruno Tertrais. «Les Iraniens ont probablement appris de la Corée du Nord qu'on peut négocier longtemps avec les Etats-Unis tout en continuant un programme nucléaire», a-t-il ajouté. «L'acquisition de l'arme nucléaire par l'Iran constitue une menace majeure pour la communauté internationale», a pour sa part affirmé la chef de la diplomatie française, Michèle Alliot-Marie, dans une interview publiée hier par le quotidien israélien Haaretz. Le programme nucléaire iranien a été condamné par six résolutions du Conseil de sécurité, dont quatre assorties de sanctions économiques et politiques. Plusieurs pays, dont les Etats-Unis, ont adopté des sanctions unilatérales renforçant ce dispositif. Les précédentes discussions entre les parties remontent à début décembre à Genève.