Cette tentative qualifiée de diversion par les opposants n'a pas duré longtemps. Enfin, le dialogue est amorcé, hier, entre des représentants du gouvernement égyptien et une partie de l'opposition, les Frères musulmans. «Les deux parties ont, donc, convenu de la création d'un comité pour préparer des amendements à la Constitution d'ici la première semaine du mois prochain», a déclaré, le porte-parole du gouvernement, Magdi Radi. Selon ce responsable, il y a eu un «consensus sur la formation d'un comité». Lequel Comité comptera, entre autres, des représentants du pouvoir judiciaire et un certain nombre de personnalités politiques. Associés pour la première fois dans des discussions officielles avec le pouvoir en place, les Frères musulmans, bête noire du régime Moubarak, se sont mis conjointement d'accord avec les représentants du gouvernement sur «une transition pacifique du pouvoir basée sur la constitution». Mais cette tentative qualifiée de diversion par les opposants n'a pas duré longtemps puisque ces mêmes islamistes ont fait faux bond au gouvernement. Les réformes proposées par le régime de Moubarak afin de sortir de la crise politique sont insuffisantes, ont jugé les Frères musulmans, première force d'opposition en Egypte. Le projet de créer un comité comprenant le pouvoir en place et des opposants pour préparer des réformes constitutionnelles est «insuffisant», a déclaré Mohamed Mursi, haut responsable des Frères musulmans, lors d'une conférence de presse au Caire. Par ailleurs, Omar Souleimane a refusé, à la demande de l'opposition, d'assumer les pouvoirs du président, Hosni Moubarak, fortement contesté, depuis près de deux semaines. Cependant, plusieurs groupes impliqués dans le mouvement de contestation, ont, quant à eux, refusé catégoriquement de participer au dialogue tant que le président Moubarak n'aura pas démissionné. De son côté, El Baradei a qualifié ces discussions «d'opaques». «Je n'ai pas été invité à participer aux négociations, à ce dialogue, mais je suis ce qui se passe», a déclaré le prix Nobel de la paix sur la chaîne américaine NBC. «Le président est un militaire, le vice-président est un militaire et le Premier ministre est un militaire. Je pense que si vous voulez réellement instaurer la confiance, il est indispensable de faire participer les civils et c'est pourquoi j'ai suggéré de mettre en place un plan de transition dans le cadre duquel un conseil présidentiel composé de trois personnes, et comprenant l'armée, serait à la tête d'un gouvernement de transition», a tonné l'homme, le plus en vue, au cours de la présente révolte. Réagissant à ce dialogue, la secrétaire d'Etat américaine, Hillary Clinton, a exprimé un soutien prudent. «Nous avons appris aujourd'hui que les Frères musulmans avaient décidé de participer, ce qui sous-entend qu'ils sont au moins impliqués dans le dialogue que nous avons encouragé», a-t-elle déclaré à la radio américaine NPR (National Public Radio), en marge de la 47e Conférence sur la sécurité à Munich, en Allemagne. Toutefois, elle a soutenu que son pays «souhaite voir parvenir en Egypte, en référence aux appels de Washington, un processus de transition transparent, incluant toutes les forces politiques égyptiennes». A ce sujet, elle a repris la position fondamentale de Washington, en l'occurrence la revendication de la rue égyptienne, à savoir le passage à une transition dans l'ordre qui peut conduire à des élections libres et honnêtes. Même son de cloche du côté de la Grande-Bretagne. L'unique voie de salut pour les Egyptiens est, sans doute, de parvenir à mettre sur pied une transition politique ordonnée, pacifique et rapide. «Nous voulons maintenir la pression pour que cette transition calme que nous appelons de nos voeux ait lieu de façon visible», a déclaré le ministre britannique des Affaires étrangères, William Hague, sur la chaîne britannique BBC, en appelant, néanmoins, à un changement réel, visible et complet qui rassemblera le peuple égyptien. A cet effet, il a avancé que ce qu'il faut est «d'arrêter un calendrier précis pour des élections et un gouvernement plus large qui comprenne des personnes qui ne font pas partie de l'élite au pouvoir depuis ces dernières années».