Moubarak à peine parti, ministres et hauts responsables occidentaux se bousculent au Caire pour encourager le nouveau pouvoir à tenir ses promesses de réformes malgré les difficultés et les résistances. Une évolution démocratique de l'Egypte, poids lourd du monde arabe, pourrait être cruciale pour l'avenir d'une région en proie à un séisme politique, estiment de hauts responsables diplomatiques et experts, tout en soulignant la précarité de ce processus. Le président Hosni Moubarak à peine parti, ministres et hauts responsables occidentaux se bousculent au Caire pour encourager le nouveau pouvoir à tenir ses promesses de réformes malgré les difficultés et les résistances. «Nous avons foi dans la capacité de l'Egypte à réaliser une transition réussie, qui soit un exemple pour le reste de la région. C'est particulièrement important à l'heure où le monde arabe connaît des changements profonds», a déclaré le sous-secrétaire d'Etat aux Affaires politiques américain, William Burns. Mais «nous savons que la route ne sera pas facile et que c'est juste le début d'une transition démocratique compliquée», a-t-il ajouté lors d'une visite, cette semaine en Egypte. Le Premier ministre britannique David Cameron, la chef de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, les ministres des Affaires étrangères allemand, italien et suédois sont aussi venus ces derniers jours en Egypte porter des messages similaires. Si la Tunisie a initié le mouvement de révolte actuel dans le monde arabe, l'Egypte lui apporte désormais un poids considérable. Avec plus de 80 millions d'habitants, l'Egypte est de loin le pays arabe le plus peuplé, et ses évolutions internes et externes ont, à plusieurs reprises, marqué la région. Le renversement de la monarchie en 1952 par les «officiers libres» du futur président Gamal Abdel Nasser, figure de proue du panarabisme, avait à l'époque inspiré des bouleversements à travers toute cette partie du monde. Les situations restent très différentes selon les pays de la région, en fonction de leur histoire, leur structure politique et sociale ou leur géographie. Mais le secrétaire général de la Ligue arabe, l'Egyptien Amr Moussa, a reconnu que les changements se font aujourd'hui «non plus seulement de façon individuelle, mais dans la globalité du monde arabe, affectant tous les citoyens arabes». «Il suffit de voir ce qui se passe au Yémen, à Bahreïn ou en Libye pour constater ce que peut inspirer un succès» comme celui du renversement de Hosni Moubarak, souligne Robert Malley, spécialiste du Moyen-Orient au International Crisis Group (ICG), un organisme indépendant. «Mais le désenchantement peut-être contagieux également. L'éviction de Moubarak est une avancée gigantesque. Ce qui va suivre sera tout aussi décisif», affirme-t-il dans une étude du ICG intitulée: «l'Egypte victorieuse?». L'évolution de l'Egypte post-Moubarak reste manifestement très indécise. Le pouvoir est assumé par une junte d'une vingtaine de généraux dirigés par un pilier de l'ex-système Moubarak, le maréchal Hussein Tantaoui. L'armée a suspendu la Constitution, dissout le Parlement et gouverne par décrets. La détérioration de la situation économique, la faiblesse de l'opposition laïque et la puissance du mouvement des Frères musulmans, font par ailleurs planer de fortes incertitudes. Mais les militaires ont aussi promis publiquement des réformes démocratiques, des élections libres et le retour dans quelques mois à un pouvoir civil. La secrétaire d'Etat américaine, Hillary Clinton, a affirmé mercredi dans dans un dialogue organisé sur Internet avec des citoyens égyptiens que «nous devons tous être heureux de voir que certains obstacles à ce que la démocratie fleurisse dans le monde arabe aient été brisés». Mais elle a aussi prévenu: «j'espère que cela ne sera pas confisqué par un retour à la dictature, par l'extrémisme ou pour toute autre raison».