Le parti présidentiel UMP organise aujourd'hui à Paris un débat controversé sur la laïcité et la place de l'Islam voulu par le président Nicolas Sarkozy, en l'absence des responsables musulmans, qui dénoncent une stigmatisation, et du Premier ministre François Fillon. Une douzaine de ministres devraient être présents à cette convention, convoquée de 16h00 (14h00 GMT) à 20h00 (18h00 GMT) dans un hôtel parisien, qui devrait déboucher sur une proposition de résolution parlementaire, un texte non-contraignant, et quelques mesures ciblées, sans toucher à la loi de 1905 qui organise une stricte séparation des églises et de l'Etat. Le chef du parti majoritaire UMP Jean-François Copé a multiplié les interventions dans les médias pour justifier ce débat controversé, alors que ses détracteurs, à droite comme à gauche, dénoncent des visées politiciennes pour contrer la montée du Front national (extrême droite). Parmi les sujets qui seront abordés figurent la formation des imams, les lieux de culte, la rédaction d'un «code de la laïcité et de la liberté religieuse», les règles à l'hôpital et à la crèche ou la création d'un «diplôme sur la laïcité et les principes républicains». Jean-François Copé a annoncé qu'il présenterait aujourd'hui «26 propositions», certaines applicables avant 2012, «sans évolution législative», d'autres devant faire l'objet d'un «travail législatif ou réglementaire» après la présidentielle de 2012. Parmi ces propositions figure «un recueil exhaustif» compilant les textes (lois règlements et circulaires) et jurisprudences relatifs au principe de laïcité, qui devrait être prêt d'ici à la fin juin. Ce texte pourrait être complété par un «code de la laïcité et de la liberté religieuse» après 2012. L'UMP propose aussi d'instaurer par la loi l'interdiction de récuser un agent du service public en raison de son sexe ou de sa religion. Cette proposition vise notamment à résoudre des «situations complexes» en milieu hospitalier où «des femmes, souvent sous la pression de leurs époux, refusent de se faire soigner par un médecin homme», selon M.Copé. Après les discussions sur «l'identité nationale» en 2009/2010 qui avaient donné lieu à des dérapages racistes, l'annonce de ce nouveau débat a soulevé les inquiétudes de nombreux musulmans, qui sont en France entre 5 et 6 millions. Le Conseil français du culte musulman (CFCM), instance représentative, a annoncé qu'il boycottait la réunion, faisant part de l'exaspération des musulmans qui se sentent «traités comme les boucs émissaires» des problèmes de la société française. Samedi, quelques centaines de personnes ont manifesté à Paris contre cette convention. Les musulmans ont annoncé qu'ils seraient représentés par des «observateurs», tout comme les catholiques, les protestants et les orthodoxes. Pour les juifs, le Grand rabbin de France Gilles Bernheim a dit qu'il participerait lui-même au débat. Le Premier ministre François Fillon, qui sera absent aujourd'hui, n'avait pas caché dès le départ son hostilité à l'idée de ce débat. D'autres membres de l'UMP, notamment la ministre des Solidarités, Roselyne Bachelot, lui ont emboîté le pas en annonçant qu'ils n'y assisteraient pas non plus. A un an de la présidentielle de 2012, l'Islam est devenu un thème majeur du débat politique en France, sur fond de montée du Front national de Marine Le Pen.