Les décideurs nous parlent de la fin imminente du terrorisme depuis près d'une dizaine d'années. Une nouvelle fois, sans doute, Yazid Zerhouni a raté une belle occasion de se taire. Il a, en effet, cédé à la tentation des lieux communs auxquels plus personne ne croit depuis les années 95 où le discours officiel avait commencé à parler de «dernier quart d'heure du terrorisme» et de qualifier les attentats, toujours recommencés, d' «ultimes sursauts d'agonie de la bête immonde». Aujourd'hui, sept longues années plus tard, nous en sommes encore au même discours. Un discours qui, si l'on n'y prend garde, risque de causer une grande démobilisation chez les citoyens qui entendent parler, via la source la plus officielle qui soit, d'à peine 400 terroristes actifs, reclus dans les maquis les plus impénétrables et ne pouvant donc constituer aucun danger pour les citoyens, exception faite de ceux qui vivent désarmés et dans des hameaux isolés. A en croire ces déclarations, les grandes métropoles, à commencer par la capitale, seraient parfaitement sécurisées. Est-ce réellement le cas? Rien n'est moins vrai. Pour s'en convaincre, il n'est que d'emprunter les rues et ruelles d'Alger tant de nuit que de jour pour voir les formidables renforts policiers déployés et les barrages mobiles de la Bmpj installés régulièrement dans les lieux les plus inattendus et à des moments indus. Autour de la plupart des marchés de la capitale, des policiers armés jusqu'aux dents veillent au grain. Ils se montrent intraitables avec les véhicules qui stationnent à proximité de ces lieux. Les fameux «sabots» ont refait leur apparition afin de dissuader tous les citoyens de stationner aux alentours de ces lieux et de pouvoir localiser tout éventuel véhicule suspect. Des policiers rencontrés aux niveaux de certains de ces marchés se montrent formels: «Les risques d'attentats à la bombe sont omniprésents. La vigilance ne doit pas diminuer, surtout en ce mois où les terroristes redoublent de férocité et de cruauté.» Les gens doivent, à ce sujet, garder en tête la tentative d'infiltration de la capitale par les groupes terroristes mise en échec par les services de sécurité il y a de cela quelques mois. A cela s'ajoute l'information faisant état de 200 kilogrammes d'explosifs interceptés aux frontières algéro-tunisiennes, l'arrestation de sept terroristes et la fuite de trois autres dont un Algérien. Le calme, tout relatif, installé depuis la tuerie de Chlef, fait craindre le pire aux spécialistes de la question. «Les terroristes, indique-t-on, cherchent peut-être à se faire oublier quelques jours, le temps que baisse la vigilance et de pouvoir commettre un sanglant et spectaculaire attentat en ce mois de ramadan». Les déclarations rassurantes de Zerhouni, intervenues en un moment pareil, peuvent contribuer à la baisse de cette vigilance alors que, c'est précisément parce que le terrorisme est en passe d'être vaincu, qu'il risque de commettre des actes désespérés, suicidaires et particulièrement spectaculaires. Inutile, donc, de leur conseiller le suicide, ou plutôt de leur faire explorer l'idée du «suicide».