Les dissensions apparaissent au grand jour entre Washington et Islamabad, alliés depuis dix ans dans la lutte contre le terrorisme international. Le Pakistan a rejeté hier les accusations de soutien à Ben Laden lancées par les Occidentaux, Islamabad dénonçant un «échec» global des services secrets à retrouver plus rapidement le chef d'Al Qaîda caché dans une villa du Pakistan. Plus de 48 heures après l'élimination de l'instigateur supposé des attentats du 11 septembre 2011 par 79 hommes des forces spéciales américaines dans une résidence cossue du nord du Pakistan, les dissensions apparaissent au grand jour entre Washington et Islamabad, alliés depuis dix ans dans la lutte contre le terrorisme international. Sommé de s'expliquer sur la présence depuis plusieurs mois, voire plusieurs années, d'Oussama Ben Laden près d'une académie militaire à Abbottabad, au nord d'Islamabad, le Premier ministre pakistanais, Yousuf Raza Gilani, a estimé hier que cela témoignait de «l'échec du renseignement dans le monde», y compris aux Etats-Unis, et pas seulement au Pakistan. «Nous sommes au milieu d'une guerre, nous combattons une guerre contre le terrorisme et nous avons la volonté de lutter contre l'extrémisme et le terrorisme» a par ailleurs, assuré le Premier ministre pakistanais, en visite à Paris, pour écarter les accusations de double jeu. La CIA avait décidé de faire cavalier seul dans le dernier acte de la traque de Ben Laden par crainte que les Pakistanais n'«alertent» le chef d'Al Qaîda. Un haut responsable de la diplomatie pakistanaise a également affirmé que son pays avait signalé dès 2009 aux Etats-Unis comme une cache possible «parmi des millions d'autres» l'endroit où Ben Laden a été découvert. «Les commentaires qui ont pu être faits sur le manque de confiance et de coopération sont de mon point de vue quelque peu déplacés», a jugé Salman Bashir, le plus haut fonctionnaire au ministère pakistanais des Affaires étrangères. Auparavant, les autorités pakistanaises avaient dénoncé le fait que les Américains aient mené unilatéralement, sans consultation préalable, l'opération commando sur leur sol destinée à mettre hors d'état de nuire Ben Laden. Ben Laden a été localisé, après des mois de traque, à Abbottabad, une ville de garnison située à 80 km à peine d'Islamabad, et tué par un commando des Navy Seals américains. «Le Pakistan exprime sa vive préoccupation et ses réserves sur la manière dont le gouvernement américain a mené à bien cette opération sans information ni autorisation préalables du gouvernement pakistanais», a fait savoir le ministère pakistanais des Affaires étrangères. Les récriminations du Pakistan n'ont pas empêché des pays occidentaux de demander des comptes au régime d'Islamabad. Le Premier ministre britannique, David Cameron, a indiqué qu'il avait «des questions» à poser au Pakistan. «Le fait que Ben Laden ait vécu dans une grande maison dans un quartier résidentiel montre qu'il devait avoir un réseau de soutien au Pakistan», selon M.Cameron.