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Un printemps arabe sanglant
APRÈS CINQ MOIS DE REVOLTES
Publié dans L'Expression le 16 - 05 - 2011

Plus de 5000 morts, tel est le bilan de cinq mois de révoltes ayant touché plus ou moins gravement huit pays arabes depuis le déclenchement de la révolution du jasmin, le 17 décembre dernier.
Plus de 5000 personnes sont mortes depuis le début du printemps arabe. L'épicen-tre de ce mouvement, heureux pour les uns, catastrophique pour les autres, est la Tunisie. C'était la gifle de trop. Une humiliation mal digérée par un jeune vendeur ambulant, Mohamed Bouazizi, qui protestait contre la saisie de sa marchandise par la police, et qui a reçue «la gifle» d'un agent de police féminin. Cet incident a en fait allumé le feu qui allait se propager à l'ensemble du Monde arabe. Un effet domino à la Eisenhower. La fuite, le 14 janvier, du président Zine El Abidine Ben Ali en Arabie Saoudite a donné des idées à la jeunesse arabe qui allait exploiter ce fait bouleversant la donne géopolitique du Monde arabe. Ayant eu gain de cause, les Tunisiens ne se doutaient certainement pas du chaos qu'ils allaient vivre. Banditisme et insécurité font le quotidien du pays. Mais les Tunisiens auront payé cher leur émancipation avec un bilan chiffré estimé à 250 morts et 530 blessés. La révolution du Jasmin a donné espoir aux autres pays arabes, assoiffés de démocratie, mais surtout, gouvernés et réprimés depuis des dizaines d'années par les mêmes dictatures. Ainsi, la jeunesse égyptienne a décidé de marcher sur les traces de ses voisins tunisiens. Même scénario pour l'Egypte. Chassé par la rue au terme de 18 jours de révolte populaire, le président Moubarak démissionne le 11 février 2011, et quitte le Caire pour Charm el-Cheikh où il est, depuis, assigné à résidence et fait l'objet, avec ses fils et son épouse d'une enquête judiciaire pour corruption et violence contre les manifestants. Entamée le 25 janvier, la révolte sans précédent contre le régime de Moubarak q'est traduite par la mort de quelque 300 personnes et des milliers de blessés. Les Egyptiens vivent, à quelques détails près, le même calvaire que les Tunisiens; des accrochages entre musulmans et coptes au Caire sont de plus en plus fréquents. Dans le même esprit, et avec les mêmes espérances, la jeunesse libyenne a décidé de se soulever, à son tour, contre le régime de Mouamar El-Gueddafi. Mais les choses ont pris une tournure complètement différente. Depuis le 15 février, la révolte fait face à l'obstination et à la détermination d'El-Gueddafi qui n'hésita pas à user des armes lourdes (aviation, blindés) contre la population civile pour garder le pouvoir qu'il occupe depuis 42 ans. C'est en Libye où, il y a eu le plus de victimes avec quelque 3000 morts comptabilisés jusqu'ici.
Avec comme conséquence directe une guerre civile dont il serait difficile de prévoir l'issue et les dégâts qui peuvent être encore occasionnés. Depuis que les manifestants ont décidé de prendre les armes contre le pouvoir, les événements ont pris une autre tournure, ils se sont transformés en une crise internationale avec une ingérence flagrante au nom de la protection légitime de la population. Pis, le pays, après la reconnaissance de plusieurs Etats du Conseil national de transition (CNT), pourrait aller vers la partition, engendrant la disparition de la Libye. Même scénario en Syrie où rien ne va plus. Effectivement, Al-Assad n'a nullement l'intention de quitter le pouvoir, mais le peuple syrien se veut pacifique dans son mouvement de protestation et n'envisage pas de prendre les armes contre le pouvoir. Aussi, il refuse toute ingérence étrangère quelle qu'elle soit. Ce choix tactique a indubitablement une relation directe avec l'expérience dramatique que vit la Libye. L'appel, le 15 mars, d'un rassemblement d'une page Facebook pour «une Syrie sans tyrannie, sans loi sur l'état d'urgence, ni tribunaux d'exception», a ouvert le champ a des manifestations, réprimées, parfois dans le sang, par le gouvernement de Damas.
Depuis le début du mouvement de contestation, qui n'annonce pas de règlement dans l'immédiat, entre 600 et 700 personnes ont étés tuées et plus de 8000 autres arrêtées ou portées disparues, selon des ONG syriennes. Quant au Yémen, c'est l'impasse. Depuis trois mois, le président contesté, Ali Abdallah Saleh et les manifestants campent sur leurs positions. Il est triste de constater l'échec des révolutions arabes. Effectivement, les résultats obtenus sont loin d'être ceux escomptés. Insécurité et incertitude font le quotidien de tous ceux qui se sont engagés dans cette aventure sans pour autant être assurés d'en récolter les fruits.


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